Ce qui n’était qu’une rumeur, il y a quelques temps encore, s’est très vite avéré. Tes petits rats sont allés visiter, découvrir, questionner, prétendre être intéressés pour glaner les informations nécessaires à l’établissement d’un rapport et te le remettre pour que tu en prennes connaissance.

Chose que tu as fait, un cigare entre les lèvres, un verre de whisky posé sur ton bureau. Et c’est intéressant. Très intéressant.

Tu as envoyé, alors, quelques-uns de tes plus fidèles rats, volontaires, pour aller visiter et… approfondir les connaissances.

Le résultat de leurs efforts, c’est … que c’est intéressant. Qu’il y a matière à… négocier. Peut-être.

C’est donc toi qui te prépares, devant ton miroir, usant de tes pouvoirs pour refaçonner ton visage, achever de t’affairer, t’habiller, mettre de l’ordre dans tes cheveux pour partir.

Sur place, tu ne sais que penser de l’atmosphère des lieux. Cigare toujours entre les lippes, tu balayes les lieux du regard. Pour finalement les poser sur une âme se trouvant derrière le comptoir, tapotant dessus. Tu t’approches, sous les traits de « Bonifaccio » - pratique d’avoir plusieurs prénoms pour se créer des identités. Bonifaccio, c’est une version plus jeune de toi, les traits tirés, les cheveux un peu plus longs, plus de cicatrice et un cache-œil sur le gauche. Tu tousses pour t’éclaircir la gorge et surtout, attirer l’attention du… propriétaire ? Standardiste ? Chargé d’accueil ?

« Bonsoir. »

Tu susurres, doucement.

« Un ami m’a parlé de l’endroit. Et j’aurais voulu plus… d’informations. »

Tu souris. Polit. Et tu attends. Sans dévoiler aucune carte, pour le moment.

Accueilli, tu l’es. Politesse, voix qui se place au même niveau. Visiblement, un sens de la confidentialité qui se confirme rapidement. Tu crapotes sur ton cigare, paisiblement. Attentif à ses mots. À ses gestes. Aux micro-expressions qui passent sur son visage. Puis, tu penches la tête sur le côté, lentement.

« Je ne souhaite pas de chambre. Pas ce soir. »

Tu réponds, doucement. Non, toi, les prosituté.e.s, ce n’est pas ton truc.

« Toutefois, j’apprécierai ne pas discuter dans le hall. Peut-être pourrais-je m’entretenir avec un responsable, pour obtenir plus d’informations avant de prendre quelque décision que ce soit ? »

Tu ne cherches pas forcément à piquer l’égo – car tu sais que tu as affaire au gérant – mais tu veux voir s’il te le confirme de lui-même. Si tout cela est assumé ou non. Il te semble jeune, tout de même, pour se lancer dans un tel business. Surtout risqué comme c’est.

Et tu préfères ne pas commencer une conversation sérieuse dans un hall.

« Je ne dirais pas non à un verre, en attendant. »

Tu lui offres un sourire sérieux. Tu joues un petit peu à battre le faux pour obtenir le vrai.

Tu acceptes l’invitation à le suivre, non sans te méfier un tant soi peu. Confiant, mais sur tes gardes. Joli paradoxe. Tu sais, simplement, qu’un humain lambda ne fait pas le poids contre toi. Et tu as de quoi te défendre si besoin. Bien caché sous ton menton, contre ta cuisse. Une lame, toujours. Pas fort, mais agile. Ne jamais sous-estimer les petits fragiles.

Tu t’avances, observant les lieux, les détaillant, les mémorisant. L’halte te semble normale. Tu hoches du chef, discrètement. Le premier point que tu as noté, c’est cette propension à se couvrir. À communiquer par téléphone. Rapide. Efficace. Tu n’en étais pas bien sûr à ton arrivée, mais ses mots te le confirment.

Finalement dans la pièce, tu restes debout un instant. Le laisse parler. Un infime sourire étire tes lèvres. Sa remarque sur le fait de devoir prévenir t’a même presque tiré un rire. Cela te fait penser à ton entrevue avec Saturne, tiens. Prévenir, hein. Tu estimes qu’il n’a pas entièrement tort. Mais tu ne pense pas avoir mal agi en débarquant à l’improviste. Au contraire. Tu veux voir ce quoi est fait cet établissement et surtout son patron. En mesure de tenir les surprises et demandes de dernières minutes ? Est-il capable de supporter la pression ? Il semblerait qu’il veuille traiter avec les Vesperis. Sait-il au moins pleinement dans quoi il se lance ?

Visiblement, assez pour savoir comment débusquer l’un des vôtres. Tu la sens, cette odeur, alors que tu t’intéresses aux bouteilles. Si familière. Mais tu sais résister à l’appel du sang et de son goût. Peut-être parce que, malgré les siècles, tu ne trouves pas cela plus appétissant – d’un point de vue psychologique – que cela. Non, tu préfères opter pour une bouteille de rouge classique, la meilleure, selon tes goûts et ton expérience de barman et tenancier.

« Vous auriez un tire-bouchon ? »

Tu demandes, poliment. Une réponse plus tard et l’objet obtenu, tu t’attèles, dans des mouvements agiles teintés d’habitudes à ouvrir la bouteille. Toutefois, tu ne te serre pas immédiatement. Tu la laisses s’aérer un peu. Lui ? Tu ignores ce qu’il veut.

« Je vous serre la même chose ? Ou je vous laisse vous débrouiller ? »

Tu demandes, poliment, mais en t’alignant sur lui. Si tu dois être autonome, tu supposes que tu peux le laisser l’être également. Bouteille posée, tu viens trouver un endroit où poser ton séant. Tu comptes, en même temps, le temps qui passe avant de pouvoir accepter de te servir. Tu aurais peut-être dû choisir un whisky, tiens. Cela aurait été moins long.

« J’aurais pu, en effet, vous tenir au courant de mon passage. Je ne suis toutefois pas certain que cela aurait profondément changé l’accueil que j’aurais reçu. »

Tu finis pas dire, commençant ainsi ta réponse.

« N’y voyez pas là une critique, ce n’est pas mon but. Je constate, simplement. Votre établissement n’est pas bien ancien, n’est-ce pas ? Le bouche à oreille ne peut pas être, à lui seul, suffisant pour faire tourner une affaire aussi grosse que ce que vous avez l’ambition de lancer. »

Ta tête penche sur le côté. Avec des gestes lents, tu t’attèles à sortir une boite à cigares de la poche interne de ton manteau. Tu ne veux pas lui laisser penser que tu vas t’en prendre à lui, ce n’est pas le but. Enfin, tu sors l’un d’entre eux, viens le couper avec précision avant de l’allumer.

« Je me permets. »

Tu lâches. Par bienséance. Mais tu ne souffriras d’aucun refus ou demande d’éteindre ton puant.

« Quel genre de service offre votre établissement ? Ne me faites pas l’affront de prétendre que c’est un hôtel classique, je ne vous croirais pas. »  

Curiosité. Mais bienveillance. Tu veux entendre sa version des faits. Voir comment il présente la chose. Et voir ce que tu peux en tirer.

On y vient.  

Petit à petit, le sujet de plus en plus sérieux et la langue se délie. Tu finis par servir deux verres, lorsque tu estimes avoir assez attendu, avant de faire tourner le liquide carmin pour achever le travail, d’un mouvement souple du poignet. Celui de quelqu’un qui sait ce qu’il fait.

Le jeune homme répond. Tu notes les informations dans ta tête. Dans ton crâne. Mais la question finale arrive. Tu laisses planer le doute, un instant. Tu as bien noté son geste. Cette main qui se glisse sous la table. Il cherche quelque chose. Le bouton d’une alarme ? Un sourire, avant de souffler ta fumée, dans ta réponse.

« Ami. »

Pour l’instant. Tout dépendra des informations à venir. Oui, cela fait beaucoup de « ça dépend ». Mais tu ne peux t’engager à cent pour cent dans un projet sans en connaître tous les tenants et aboutissants.

« Vous pouvez sortir votre main de sous la table. Je ne vous veux pas de mal. »

Tu viens finalement boire une gorgée du vin, prend le temps de déguster. Et faire une moue ainsi qu’un léger mouvement de tête sur le côté. Bouteille correcte pour un tel établissement. Voilà ta conclusion. Tu t’attendais peut-être à pire.

« Vous vouliez jouer carte sur table. J’admire votre franc parlé. »

Tu poses le verre. Te penche en avant, les avant-bras posés sur tes cuisses et le fixe, droit les yeux.

« J’ai des… « amis ». Qui auraient besoin de lieux où se poser. Reposer. Disparaître temporairement, de temps à autres. »

Oh, tu n’es pas à dire l’entière vérité de tes activités mais tu ne peux très clairement pas dévoiler toutes tes cartes. Jamais l’on ne te verra dévoiler entièrement ton jeu. Jamais.

« Je leur cherche un endroit où la disrcrétion est garantie – pas promise ; garantie. »

Un haussement de sourcil. Tu te recules dans ton fauteuil, reviens fumer.

« Vous sauriez me dire si ce que je cherche peut se trouver ici ? »

Le spectacle qui s’offre à tes yeux te tire en effet un sourire. Quelque chose dans l’exagération te fait dire qu’il sait qu’il n’est pas en position de maître, dans la situation. Pour autant, tu sais que tu ne lui feras pas de mal, quelle que soit sa réponse ; exception faite d’une insulte quelconque.

Tu l’écoutes, attentif. Avant de claquer la langue. Les traits de Bonifaccio se durcissent un peu. Son regard s’acère.

« Je crois que vous ne m’avez pas bien compris : je ne demande rien de gratuit ; je demande une garantie. »

Tu tournes ses mots dans sa tête pour réfléchir à comment lui répondre pour le mieux. Mais c’est la fin qui te fais tiquer. Hausser un sourcil. Tu n’y répondras pas immédiatement. Tu le gardes pour plus tard.

« Quel genre de travail vous attendriez de la part de… appelons les « des locataires » ? »

Tu demandes, surtout.

« Je suis prêt à payer. Mensuellement. Une facture établie par mois : le nombre de nuits, par personnes. Les frais si les lieux sont laissés en désordre. Je prends en charge. »

Une pause, une gorgée.

« Mais pour ce qui est de travailler, je ne peux rien garantir. Tout dépend de ce que vous demandez. Et je ne peux forcer ces… « locataires » à accepter le contrat ou non. »

Tu sors un cendrier portable de ta poche pour y écraser ton cigare, tranquillement. Serein.

« J’ai un ami qui sait renseigner. Peut-être que vous mettre en relation pourrait porter un poids dans la balance des négociations. »

Tu finis par lâcher, en relevant le museau vers lui et accrocher son regard, de nouveau.

Tu écoutes. Et il parle. Détaille. Tu hoches du chef. Nous y voilà. Certaines créatures vendent donc leur sang. C’est une forme de prostitution, donc. Enfin, dans ton esprit, c’est le raccourci qui s’effectue. Tu es un peu vieux jeu sur les bords.

« Très bien. Je prends l’information en considération et je soumettrais l’idée à ceux que cela pourrait intéresser. »

Mais tu sais déjà que certains seraient d’accord. Et tu as besoin que certains soient d’accord. Ce genre de pratique, ça rapporte beaucoup niveau connaissances. Tu le sais. Tu as l’expérience dans le domaine. Pas à le faire toi-même, mais à avoir des employé.e.s qui le font pour toi.

« Allons pour la facture mensuelle. Je règlerai en liquide. Vous comprendrez le besoin de discrétion et d’anonymisation. »

Les virements et les chèques sont inconcevables pour toi. Tu songes, un instant. Avant de boire une gorgée.

« La garantie que je requiers ne concerne que l’intérieur de ces murs. L’extérieur, ce sont mes affaires. Toutefois, vous avez bien raison : ces lieux pourraient attirer l’attention de gens… dont vous ne voulez pas l’attention. Mes « amis » savent se débrouiller, en règle générale. Tant que l’alerte est donnée, ils devraient être en capacité de ne pas vous ajouter un poids sur les épaules. »

Tu clos les yeux, une demie seconde. Un léger sourire étire tes lippes. Tiens, on en vient aux identités.

« Bonifaccio. Et vous êtes ? »

Tu plonges une main dans une poche, à la recherche de ton cellulaire. Le déverouille. Ouvre la page de création d’un nouveau contact.

« Je vais avoir besoin de vos coordonnées, pour mon ami l’informateur. Je les lui transmettrais. Qu’à cela ne tienne : il n’utilise jamais deux fois le même numéro s’il vous contact par téléphone, n’utilise jamais deux fois la même adresse mail et peut vous faire parvenir une information sous les traits de n’importe quel coursier. Aussi, il ne vous donnera pas son nom. Alors, gardez en tête qu’il s’agit du Roi des rats.»

Un temps.

« Peut-être qu’une formule de politesse – ou formule magique – pourrait vous permettre d’identifier ses petits rats ? »  

Une suggestion, en apparence. Une demande précise, en vérité. C’est plus facile, si tu ne dois pas envoyer les mêmes personnes ou emprunter les mêmes traits, pour qu’il puisse identifier tes informations aisément et que tu n’aies pas de barrière quelconque.

Charlie.

Tu notes l’information. Mais elle n’est pas assez complète à ton goût. Et en même temps, il répond à la hauteur des informations que tu lui concèdes. Tu notes de mettre un rat à ses trousses pour obtenir ce qu’il manque pour compléter les trous du texte.

Tu le laisses, toutefois, parler. Réfléchir à voix haute. Décréter, également. Ce qui l’arrange. Facile à retenir. Parler du prix de l’essence ? Ça devrait le faire. Tu viens pianoter sur ton téléphone, un court instant, pour mimer le fait que tu envoies un message à toi-même.

« Information passée. »

Tu susurres, avant de venir chercher une nouvelle gorgée de ton vin. Et poser le regard sur lui. Hausser un sourcil, lentement.

« Je peux passer la demande, si vous le souhaitez. Mais je comprendrais bien que vous préféreriez en parler directement avec mon ami. »

Tu fixes ton verre, un instant. Laisse planer un léger silence, comme pour le laisser intégrer les informations.

« C’est vous décidez. »

Tu conclus, doucement, un sourire venant discrètement étirer tes lippes. Du reste… tu te creuses la tête. Des personnes qui pourraient faire de la sécurité, tu en connais un bon nombre. Des gens de confiance pour faire de la sécurité… tu n’en connais pas tant que ça que tu n’emploies pas déjà. Tu fais la moue, passe ta langue sur tes dents, avant d’achever ton verre d’une traite.

« Il faudra que j’y réfléchisse, mais là, comme ça, je n’ai pas de nom en tête. Je veux dire par là : pas de nom à qui je confierai ma vie. »

Tu te réinstalles dans ton siège, le dos contre le dossier, croise les jambes.

« J’allais vous faire l’affront de vous demander « pourquoi » par réflexe, mais je sais bien pourquoi. Toutefois, si je peux me permettre un conseil… ne faites jamais confiance à l’un des nôtres. Et je compte dans le lot. Mon ami compte dans le lot. »  

C’est un conseil avisé. Mais un conseil vieux de 700 ans d’expérience. De ton expérience.

« Je peux toutefois me renseigner si un nom ressort. Ou demander à mon ami de trouver une liste de prétendants possibles. »

Tu ne réponds pas à ses remerciements. Ca fait partie de la négociation, après tout, non ? Et puis. Tu n’es pas certain de lui trouver qui que ce soit. Alors, tu passes à autre chose. La suite, oui. Celle qui te fait pencher la tête sur le côté. Tu l’écoutes, attentivement. Mais c’est un rire qui t’échappe. Court, succin. Mais il a tout de même le mérite d’exister. De s’être échappé. Tes doigts viennent pianoter sur ta cuisse, lentement.

« Flou, oui. Sûrement. Mais irréaliste, surtout. »

Tu marques un temps. Une pause. Creuse ta mémoire. Mais…

« Qu’est-ce que la vérité, au fond ? »

Tu marmonnes. Viens rallumer ton cigare, pour crapoter dessus. On dirait un vieux qui fouille ses souvenirs pour savoir quoi raconter ou non. En vérité, tu cherches la moindre trace d’un rapport existant qui pourrait servir dans cette situation, mais…

« Non. Rien. Je n’ai rien dans ma mémoire à ce sujet. À part les contes, les mythes, les légendes. Les sorcières et la chasse qui en a découlé qui, au fond, est juste une injustice provoquée par l’Humain et son désir de toujours posséder ce qui ne lui appartient pas. Salem. Sale histoire. Penchez-vous sur les archives : vous n’y verrez rien de magique. À la limite, de l’ergotisme. »

Tu hausses les épaules.

« Je ne peux pas vous aider plus, à titre personnel. Mais je demanderai à mon ami s’il a quelque chose ou s’il peut trouver quelque chose. Toutefois, si vous aviez un endroit où commencer à fouiner, pour que le rat y mette son nez… »

Une piste. Une indication. Quoi que ce soit, plutôt que des suppositions, des superstitions, voire pire : des fantasmes.

Tes traits changent. Au sens propre du terme. Tu ne te moquais pas de lui. Tu riais de l’idée. Non pas qu’elle soit totalement incohérence. Mais s’il y avait eu une seule preuve de l’existence de telles anomalies, bien sûr que tu le saurais. Tu en es convaincu. Aucune once de doute en toi à ce sujet.

Toutefois, le ton qu’il prend à ton égard te tire un grondement. Te fait perdre le contrôle. Tes ongles s’enfoncent dans ta cuisse pour ne pas venir s’enfoncer dans sa gorge. S’il réussi à aller jusqu’au bout de ses propos, c’est uniquement grâce à ta capacité à te contenir.

« Je n’apprécie guère ton ton, Charlie. »

Tu susurres, sèchement. Tu as l’air bien moins jeune, physiquement, tout à coup. Ce sont tes véritables traits qui reprennent leurs droits sur ton visage. Bonifaccio laisse la place à Dante. Ton visage s’abime. Vestige des siècles vécu. De ton statut de Vesperis. Tu as l’air bien moins humain, tout à coup. Plus monstrueux.

« Ce qui est profondément risible, ce sont les humains qui pensent sincèrement être seuls sur cette planète et dans le système total. Ceux qui pensent être les APEX predators. »

Le Roi des rats se présente. Dans toute sa splendeur. Tes doigts viennent ôter le cache-œil pour plus de confort. Peut-être pour marquer un peu plus ton inhumanité.  

« J’ai un penchant pour les créatures faibles qui rêvent de transcender leur condition. Mais Charlie. Ne t’avise plus d’insinuer, directement ou non, que je suis un ignare. »

Finit les « vous ». Quand tu tutoies, c’est pour ordonner. Menacer.  

« S’il y avait eu une seule piste tangible, je serais au courant. S’il y avait une seule preuve, j’en aurais connaissance. S’il n’y avait qu’un tant soit peu de réalité derrière ce fantasme, alors je serais au courant. J’en aurais entendu parler. »

Tu t’enfonces dans le fauteuil. Droit contre le dossier. Ramène le cigare entre tes lèvres.

« Je parie que ta piste est stérile. Trouve m’en une autre. Au cas ou, si tu veux. »

Tu as fait tomber le masque, Roi des rats.

« Mais surtout, enfant, parle moi une fois encore de la sorte et je ne promets pas une bonne conduite de ma part. »

Tu es gentil, pour un Vesperis. Il serait faire preuve de bonne conscience que de ne pas en abuser.

Il a sa chance de se rattraper. Autrement, tu n’aurais pas été que menaçant. Et il la saisit. Ouvre la bouche. Parle, encore. Beaucoup. S’enfonce, l’espace d’un instant. Par chance, toutefois, il trouve utile de faire mention d’un détail qui te tire un haussement de sourcil.

« On peut dire que c’est pour le moins original. »

Tu lâches. Peut-être un peu (trop ?) sèchement, mais principalement car quand bien même tu sais faire preuve de maitrise de toi, il t’es compliqué de t’apaiser en un claquement de doigts. Tu viens te pincer l’arrête du nez, quelques secondes, sourcils froncés.

« C’est… amusant. Les termes que vous utilisez, je veux dire. Ronger. Se sentir rongé de l’intérieur. Ce sont des termes souvent utilisés par des personnes malades, Charlie. »

Une pause. Un instant. Le regard se pose sur l’humain.

« Je serais vous, j’irais faire un tour à l’hôpital, avant de fouiller du côté de Salem. »

Un conseil, peut-être. Tu ne sais pas trop. Mais ce dont tu es certain, c’est que ce n’est pas une moquerie.

« Après tout, c’est officiel et ce n’est pas caché : les humains meurent plus du cancer que d’autre chose, ici, à Arkham. »

Même si tu trouves cela étrange, d’ailleurs, que les statistiques crèvent autant le plafond ici par rapport à ailleurs, mais tu n’as pas pris le temps de creuser plus, encore.