Un vent mauvais sillonne ces terres saines. Pures. Une bête affamée – plus affamée qu’elle – y traîne. Elle l’a aperçu non loin, et se demande s’il sait qu’elle l’observe déjà. Ses pupilles lorgnent sa haute carcasse qui se meut entre les pans des arbres. C’est une vilaine bête qui se tient là ; elle devrait s’en méfier.

Elle n’en fait rien.

C’est la colère qui gronde. La colère d’une mère dont on a malmené l’engeance. Pasiphae se fait vipère, vilaine en retour, mauvaise comme il l’est. Il le faut. C’est le sort qui en a décidé, et plus rien ne saurait arrêter cette infernale machine pleine de son venin.

Misère, elle y songe : ce destin aurait pu être un autre, si tout s’était arrêté ce soir là sous la neige, alors que rien d’autre n’existait que leur voix portées par le vent, pour s’éteindre dans la nuit. Misère – qu’importe.

Elle plante sur lui deux pupilles fendues, à défaut de planter à sa gorge des griffes acérées. S’imagine en crever la peau, pour y laisser à jamais une cicatrice qui raconterait : voilà le fruit de ce que tu as semé.

Elle n’en fait rien.

A pas feutrés, elle avance, et quelques mètres derrière lui s’immobilise. Ses lèvres se tordent – curieux plaisir éprouvé à provoquer la bête qui rôde ici.
— Dis-moi. T’es-tu perdu ?
Presque, elle rit.