Un,
         Deux,
                      Trois pas.

La nuit est tombée, incapable à te blesser ; tu vis sous les étoiles, désormais. Tu vis sous les étoiles, Alienor, et au fil des années, tu n’as pu qu’apprendre à les écouter. Elles te disent quoi, les étoiles ? Penses-tu que ce soient les étoiles qui te parlent, quand tu m’entends chuchoter ?


Ploc,
            Ploc,
                          Ploc.

Tes talons claquent sur le sol mouillé, mais tu ne les entends pas. D’un geste distrait, ton poignet essuie le bord carminé de tes lèvres, efface les traces d’un méfait dont on t’a appris à te cacher. Vesperis, de jour comme de nuit, pour expliquer la blancheur de ta peau et la pâleur de tes lèvres que tu caches sous les éclats vermeils.

Vespe-…

— Non.

Tu m’entends, parfois. Tes pas s’arrêtent, les yeux levés vers le ciel. Quelques gouttes de la pluie dévalent tes joues, tes cheveux ondulent sur ta peau. Tu as raison, Alienor, tu n’es pas simple vesperis, pas simple esclave d’un nom, esclave d’une condition. Tu es, tu vis, tu respires, tu cherches du regard l’origine d’une musique que l’air mène jusqu'à toi. L’harmonie est trop douce pour résister, les yeux fermés tu te mets à valser au beau milieu des pavés.

Les yeux fermés, tu fredonnes le rythme de celle que tu étais. Celle qu’on a aimé, celle qu’on a abandonnée. Tes lèvres s’étirent d’un sourire apaisé, les passants t’évitent pour ne pas avoir à croiser cette femme qui danse seule dans la nuit.

Qu’importe, Alienor.
Tu es si belle, quand ma voix ne t’atteint plus
et que tu valses aux chants de la lune.