Le sol est encore trempé de la pluie d’hier - des flaques ici et là se sont évaporées dans l’air humide et sentant la poussière. Il y a des odeurs âcres de fer et d’amer qui chatouillent les narines - le nez se froisse dans une mine contrariée.

Elle le croit encore tapi dans les ombres - elle croit sentir sa présence - les rats grouillent. Un frisson le long de ses bras grimpe jusqu’à la nuque ; la fatigue est outrepassée dans une attention jetée à la brume - vigilante.

Une silhouette dévorée par le brouillard se lève dans une impression de colosse. Colombe sent l’odeur de la mort. Presque aussitôt, elle dégaine un pistolet ; le bras tend en avant et le regard perce les volutes. Un râle du presque-cadavre se fait entendre, et Colombe n’hésite plus ;

Elle tire.
Sans s’annoncer ; sans se faire prier ; l’adrénaline grimpe.
Elle tire trois fois ; sans pitié et le coeur qui vrombit dans la cage thoracique.

Le regard reste grand ouvert ;
Et Colombe croit halluciner lorsque sans un battement de cils ; le monstre se volatilise. La gorge se serre, les muscles tendus - elle est à l’affut.

Les flaques d’eau sont piétinées dans un fracas sourd, Colombe réalise ; que le monstre n’a disparu qu’à son regard.
Elle se demande un instant ce qui est réel - ce qui ne l’est pas - mais elle n’a pas beaucoup de temps pour réagir.

Elle veut reculer - trop tard.
Un coup de griffes ; sous les côtes, elle sent une vive douleur. Cela l’attrape comme si l’animal avait empoisonné ses griffes, comme une brûlure - une décharge qui parcourt tout le système nerveux soudainement. Elle a reculé d’un pas à peine qui n’a pas suffit, et même si la blessure peut paraître superficielle, le sang qui en coule ne laisse aucune place pour le doute - l’assaut l’a atteinte.

Elle sent son coeur battre contre ses tempes ;
Les lèvres restent ouvertes, elle halète.
En une seconde elle attrape le long couteau à l’étui à sa ceinture, et elle fait un arc de cercle devant elle, obligeant la bête à reculer.

Elle tire une nouvelle balle en face ;
Mais Colombe tire à l’aveugle, elle guette les mouvements dans les flaques d’eau pour se repérer, et a la gâchette facile - mais pas des balles illimitées.

Ton nom - je veux ton nom si je dois mourir de la main de quelqu’un ce ne sera pas d’un anonyme.

Qu’elle crache pour se donner contenance.