Le bruit des bouteilles emplissait son crâne, coup, par coup, sur couche. Sa forme féminine se voulait lascive sur le bar, à éclater de rire de ces choses que seul un homme en mal de femme pouvait dire. Se désirait-elle adulte, comme un reflet éternel, une juxtaposition des figures sensuelles entrevu à travers les médias du monde ? Ou se désirait-elle ?

Elle ne se questionnait jamais sur ce genre de choses, elle était et voilà tout. Peut-être que si se questionnait-elle. Chaque ombre perçue avait l’odeur de son sang, cette odeur putride qu’elle guettait, la gueule entrouverte, la crainte de la proie devenait l’anticipation de la Byrd.

Faye ne savait ni nom ni prénom, ne connaissait de ses coutumes si ce n’était qu’il était un marcheur de la nuit. Pourtant quand il apparaissait et que sa voix grondait les milles foudres de sa puissance, elle sentait ce curieux souvenir. Cette alcoolémie prononcée l’avait poussé à franchir les seuils de la déraison et elle allait en subir les conséquences.

Et il est intervenu.

À chaque fois.

Il intervenait.

On lui propose de danser, on lui prend la main, l’écrase de moitié d’une force méchante, et elle voltigeait. Elle ne rigolait plus désormais, grave était la poupée. Léger était la poupée, ce nom susurré à son oreille.

La main sur sa chair, cette main ne supporterait pas le nom. Mais la gueule supporterai le crachat et le rire mauvais.

“Nique toi, clochard”

Elle disait ça sans jamais vraiment y penser, c’était plus amusant ainsi. Il devenait rouge, la vermine humaine, la virilité crude. Et il la fit danser maintes fois encore, refusant de la lâcher, menaçant d’écraser son poing sur sa tronche de pétasse. Elle l’attendait, Faye Byrd avait vu la mort pour ne pas être intimidée par ses laquais.

Peut-être était ce le verre de trop qu’elle a bu qu’il la rendait courageuse?
Peut-être qu’elle ressentait encore cette lourdeur en ses tripes ?

Mais Faye Byrd se laissa traîner dans le coin où les filles en ressortent femme contre leur gré.
Mais Faye Byrd ne cligna pas des yeux quand l’homme vola, s’écrasa mollement, poupée dégonflée, sur les dalles dégoûtantes.

Elle le regardait que lui, son Géant, le Monstre de la Nuit. Fermant les yeux, elle voulut invoquer la peur, la terreur, les instincts primitifs de survie mais ceux-çi se tenaient sagement en retrait, endormis par l’alcool.

-Yo.

Simplement
Parce que rien n’était simple ici bas.

melodiam
tw: comportement paternaliste
il n’a toujours été que monstre caché sous le lit, tapit dans le renfoncement sombre d’un entrebâillement d’une porte, le souffle mourant contre les lates béantes des portes de placard. il est là, n’a jamais été bien loin. il est là et il le sera encore lorsque seule l’odeur de la terre humide et des couronnes de fleurs seront la dernière demeure de l’enfant. parce que faye byrd n’est rien de plus qu’une enfant à ses yeux. mais la plus précieuse des enfants. une enfant qui ne sait pas vivre sans flirter avec la mort.

alors, les nuits où faye byrd décide de prétendre être une femme, il veille. comme à chaque fois, comme toujours. et cette nuit, il est là. il observe, témoin de l’enfant qui se noie dans son envie de paraître, d’être maladroitement. il a quitté son trône pour en gagner un bien plus modeste et caché. le menton appuyé, nonchalant, contre son poing fermé, il scrute, épie. se glisse, sournois, dans un quotidien alors qu’il n’y a jamais vraiment été invité. il est là, toujours. habité par une obsession. le souvenir plaisant d’un goût proche du paradis. si seulement il pouvait croire à ces conneries.

il surveille, reste témoin de ce qu’il se passe au loin. malgré le sourire amusé qui étire ses lèvres, ça remue quelque chose dans ses entrailles. un quelque chose qui ressemble à de l’agacement. de la colère ? ses yeux sombres suivent la scène, accompagne l’enfant qui est traînée — sûrement contre son gré. un délicat soupir lui échappe. ses immenses mains se posent contre les accoudoirs du fauteuil qu’il occupait afin de se lever. géant occupe l’espace, surplombe tous les corps en transe sur la musique criarde. il les cache, ses immenses mains, enfouies dans les poches de son pantalon. et il s’éloigne de sa démarche lente et détachée.

poigne féroce se referme sur l’épaule qui semble se briser au son délicieux des os. vulgaire humain vole au loin, le bruit de son corps lourd contre les pavés ne fait qu’à peine réagir saturne. ne prend pas la peine de lâcher le moindre mot à l’insignifiant porcelet qui comptait transformer l’enfant en femme. peut-être saturne aurait-il pu laisser faire ? pour simplement voir à quel point cet acte aller faire plonger encore plus loin faye byrd dans les abysses inconnues de son âme. mais saturne atkins ne supporte que très peu que l’on touche à ce qui lui appartient. et depuis cette nuit où il a dévoré mère, père et frères, il a décidé que cette enfant était sienne.

il reste silencieux. leurs regards se plongeant l’un dans l’autre. elle n’a jamais ressemblé à une biche effrayée, n’a jamais porté sur ses frêles épaules le poids de la proie apeurée. et lorsqu’elle ferme les yeux, il continue de la regarder. jamais il ne s’en lassera. un sourire s’installe alors qu’elle le salue de la façon la plus détachée possible. ❝bonsoir faye. la tête baissée vers ce si petit corps, il inspire doucement. l’air chargé semble l’électriser. ❝j’espère ne pas avoir foutu en l’air ton rendez-vous. bout de son épaisse bottine en cuir noir tapote le bitume poisseux. il regarde autour d’eux un court instant avant de tendre sa main froide vers elle. ❝tu ne devrais pas rester seule ici. tu ne sais jamais sur qui tu pourrais tomber. malgré la faim qui gronde, malgré le sourire malsain, malgré la carrure imposante et le froid du corps, une étrange chaleur semble luire au fond de son regard attendri.

d’un geste rapide, il a retiré le blouson de cuir qu’il portait pour le poser sur les épaules menues de l’enfant. elle semble perdue ainsi. mais saturne ne veut plus qu’on la voit. il veut qu’elle disparaisse, qu’elle ne puisse exister qu’à ses yeux. ❝ça serait con que tu tombes malade. la paterne de façon inadaptée, sans chercher à faire attention à son consentement ou non. parce que, lorsque saturne atkins veut quelque chose, il se sert sans demander. depuis toujours et en tout temps. ❝veux-tu retourner à l’intérieur ? la main toujours tendue vers elle, il attend ; lui laissant finalement un choix. tant qu’elle décide de rester avec lui. le reste n’a pas vraiment d’importance.

Enfant de la nuit, ses yeux de jais s'enfonçaient dans son visage pour décrypter les affres de son être.
Faye attendait la fin sans y croire, se disait que personne ne l’entendrait crier ou supplier si elle venait à croiser sa fatalité. Elle regardait la carcasse de celui désirant la souiller, le vit respirer et soupira doucement.

Un jet d’astre sorti de ses lèvres, le poids d’une inquiétude quant à la vie d’autrui qu’elle ne niait pas réellement. Il avait été un pion après tout, pour l’invoquer Lui. Faye oscillait sur ses jambes, cherchait à comprendre ce qu’elle ne comprenait pas, cherchait à ressentir ce qu’elle ne ressentait pas avant d’abandonner.

Elle le contemplait désormais, cherchait à comprendre cette puissance nouée en ses tripes, ce besoin de reconnaissance qui animait ses rapports avec lui et lui souriait sans y mettre beaucoup de joie.

Comme si son sourire ne captait que le soleil noir, le Lilith de leurs rapprochements. Cet homme était fait de l’étoffe de ces brutes, des figurants sans visage qu’on prenait pour représenter les monstres et les bêtes et pourtant;

Faye mit sa main dans la sienne, se laissait tirer à lui sans chercher à user de ses muscles.
Elle voyait aux renflements de ses bras qu’essayer de lui résister serait puéril.

-Non, il n’y avait rien à ruiner. Il ne m’intéressait pas.

Elle riait sans joie, pourtant, elle ne décrochait pas son regard de lui, voulait lui demander l’origine de ses émotions dont il semblait être maquillé, ce pernicieux silence posé sur ses lèvres. Elle voulait lui demander son nom et ses pensées se défaisaient avant qu’elle ne puisse les prononcer.


-En effet, on ne se méfie pas assez de la nuit, il y a des timbrés un peu partout. T’en penses quoi? T’en connais beaucoup des fous?

Sa veste sur ses épaules était glacé, elle savait bien ce qu’il était et que nulle chaleur ne s’échappait de son être et pourtant, elle rougissait un peu. Ce geste lui plaisait, s'effaçait du monde comme s' il venait de lui dire qu’elle était sous sa protection, que les maux du monde ne l'affectent pas en sa présence.
Le bout de ses doigts tapotaient doucement sa paume, glissait le long de son poignet tandis que sa langue ironisait son verbe.


-Ça dépend, tu veux me mordre ? À l’intérieur, ça serait dérangeant, trop de public. C’est ça que tu désires de moi?

Elle le fixait, ne détournait plus le regard, s’approchait encore plus de lui pour lui ordonner qu’il se laissa consumer par sa présence, par son impérieux désir de dominer. Elle ne souhaitait plus avoir peur, le comprends-tu inconnu ?

-Dis moi ton nom.

“Je t’en prie” ne franchissait pas mais la supplique silencieuse demeurait la même.

melodiam
tw: //
il est soleil noir ; elle est lune éblouissante. l’astre qui apaise l’appétit d’un vorace. et son regard se perd dans la contemplation de leurs mains. celle de faye byrd, si petite, si douce, si chaude. là où la sienne est trop grande, trop rêche, trop froide. il aime pourtant plus que de raison la sentir là, au creux de sa paume. elle semble si petite, si fragile qu’il voudrait la garder précieusement aux creux de ses bras, de ses mains. elle n’est que fleur délicate qui a pourtant résisté à des vents si forts. elle est bien plus forte qu’elle ne doit le croire elle-même.

face à une autre, saturne aurait ri. ce genre de rire fort, qui ne laisse aucune place à l’espace autour de lui. mais il ne rit pas, face à faye byrd. il sourit. simplement. un sourire qui se répercute dans son regard. son corps las, les épaules légèrement lâches, son dos quelque peu courbé, ses yeux sont pourtant perçants. prédateurs. ❝il faudrait être fou pour ne pas les voir, hm ? la voix est grave, semble faire vibrer des choses dans les tripes tandis qu’il murmure presque. la main de l’enfant toujours dans la sienne, il fait un pas en avant. avale l’espace qui les séparait. le bout de ses pieds tapant contre ceux de faye, saturne sourit toujours. surtout lorsqu’il la voit, la sent rougir.

les doigts brûlants de l’enfant sur sa peau le rendrait impatient. pire : affamé. et elle joue avec le feu, sa précieuse enfant. elle termine d’avaler les centimètres qui les séparaient. ❝te mordre ? et son sourire s’étire, s’ouvre pour laisser échapper un rire presque silencieux. elle exige, joue à la grande qui n’a pas peur. alors saturne rentre dans son petit jeu. son index se pose sous le menton de la jeune fille, l’oblige à tenir la tête bien penchée vers lui. à ne pas détourner son regard du sien. et il se penche. s’approche. son souffle sentant le fer mourant contre le visage de faye. ❝tu penses que ce que je désire de toi, c’est ton sang ? il murmure, gronde doucement. ❝ne te propose pas si facilement au premier venu, faye. tous ne pourraient pas se retenir comme je le veux pour un met aussi délicat que toi. la distance entre eux est presque inexistante. mais il ne bouge pas, continue simplement. ❝es-tu en position d’exiger quoi que ce soit de ma part, faye ? plaisir coupable que de prononcer son prénom. encore et encore. il relâche brusquement le menton, déroule sa colonne vertébrale pour se redresser. géant n’a pourtant pas lâché la main de l’enfant qui semblerait vouloir être femme. ❝Saturne Atkins. as-tu d’autres questions ? ça crève les yeux.

Lumière crue derrière eux, la scène portrait la puanteur des heures oubliées de la nuit. Dans les mèches de ses cheveux, le rouge criard s’étouffait et pourtant, elle ne voyait que ce rouge. Ce rouge fluo, ce rouge vif, ce rouge appelait la haine et les plus viscéraux instincts charnels.La lueur brûlait son regard et pourtant, elle la désirait. Elle désirait qu’on la brûle, qu’on l’eviscère, qu’on trouve une valeur à son existence par delà cette naissance. Devait-elle tuer pour qu’elle soit crainte? Devait-elle se tuer pour qu’il reste?

Vous souriez ensemble, elle le savait très bien qu’ils ne souriaient pas pour les mêmes choses. (il était prédateur). Lorsqu’il désirait la saisir, il la détruirait mais ce n’était qu’un jeu. Combien de décennies avait-il vu passer de ses yeux creux ? Elle ne serait jamais rien de plus qu’un nourrisson pour lui, devait-elle atteindre l’âge vénérable de ses aïeux.

Il l’absorbait, la contenait, la retenait de son ombre, aucun écart n’était désormais possible et Faye sentait que ces mots étaient de trop. Toute fière qu’elle fut, l’instinct de survie était la seule chose qu’elle devrait écouter.

Pas vrai ?

Son doigt glacé jouait avec la peau tendre son visage, appendice de chair et d’os qui lui imposait l’intensité de son regard. Mais la bravache, la stupide bravache la fit tenir le regard, lui offrit un autre de ces mines. Une mine close, fermée, une mine qui lui ordonnait d’être ce que personne n’est jamais - honnête.

-Que pourrais-tu désirer de plus de moi ? Tu es un vesperis, je suis un met. Tu viens de le dire, je suis qu’un met et tu es un chasseur.

Elle ne s’offrait pas; elle s’imposait. Quant à mourir, elle voulait le faire à ses termes. Mais sa main sur la sienne l’apaisait curieusement, la fraîcheur de sa paume noyait la brûlure de ses pensées. Se demandait-elle distraitement si un jour, ils deviendraient tièdes, pensive malgré l’urgence de la situation, la pression qu’elle exerçait sur sa main s’accroissait doucement.

(comme si elle voulait lui demander)

Il lâchait son menton, et elle rabaissait la tête. Privée de son soutien, comme si elle aurait voulu justifier de sa puissance et de son arrogance par sa seule revendication.

-Tu sais aussi bien que moi que les seuls pouvoirs que j’ai, c’est ceux que tu me donnes. Saturne.

Ce nom cassait dans ta bouche, lavait tes lèvres du péché de l’inconnu. Saturne. Saturne. Son monstre;son Démon; son Prince; son ? non. Il ne fallait pas apposer le possessif, pas le réclamer.

-J’en ai une infinité, Saturne. Pourquoi tu as empêché que je me fasse agresser ? Tant de fois. J'aurais été plus facile à tuer si j’étais affaiblie.

Ses avant-bras appuyés sur son torse; avalant goulûment son odeur pour ne céder aux vapeurs de l’alcool. N’était-ce pas une excuse ?
quelque chose en Saturne t’attirait.

melodiam
tw: //
il l’aperçoit enfin. cette faye dont il rêve certaines nuits. cette faye qui s’impose, qui se drape délicatement d’une noirceur féminine et fatale. pensées s’envolent, sont douloureuses. est-elle un rappel de celle qu’il a tué ; aimé ? ou est-elle ce quelque chose qu’ils auraient voulu avoir à deux, former ainsi une famille ? il n’a pas le droit de penser à ça. pas maintenant. jamais. funambule, comme toujours. mais entre deux rôles qu’il n’aime pas. il n’en a pas l’habitude. alors saturne se concentre sur l’unique chose dont il est sûr : faye byrd est à lui.

elle ne demande, elle exige. réclame une honnêteté que saturne atkins n’a jamais donné à personne. ❝la réponse a cette question ne se discute pas à l’arrière d’un club, dans une rue poisseuse. elle est complexe, tortueuse. tu es plus qu’un met. je suis plus qu’un chasseur. il sent la pression de la main brûlante contre la sienne. il se redresse, se tient droit pour lui prouver qu’elle, il pourra la soutenir. parce qu’il en a fait le choix. ❝repose-moi cette question la prochaine fois que nous nous verrons. parce que saturne ne demande pas, lui non plus. il exige. réclame une deuxième fois. puis une troisième, et encore des dizaines et des centaines.

il se penche vers elle, vers sa tête baissée. vient effleurer de ses lèvres froides l’oreille brûlante. ❝est-ce plus facile de dire “vesperis” ou mon nom ? il aime la façon dont elle le prononce. il aimerait pouvoir contempler sa bouche se mouvoir pour prononcer son prénom. elle, la seule dont il aimerait tant de choses qu’il ne comprend pas. géant se redresse et la brebis vient se coller à lui. son sourire perd du chasseur. elle arrive à faire naître des choses en saturne. ses si petits doigts chauds semblent s’enfoncer, fouiller à même les tripes, les boyaux, l’âme du Carnis. elle tire, tire délicatement le fin fil fragile de l’humanité restante du monstre qui a dévoré l’homme.

❝tu n’as pas compris, faye. je ne souhaite pas te tuer. ses immenses bras se referment autour de la jeune fille. sa main s’appose contre sa chevelure blonde, le visage baissé vers la délicate fleur entre ses bras. ❝du moins, pas encore. les caresses dans les cheveux contrastent presque désagréablement avec les paroles raclées contre son palais. ❝je n’en ai simplement pas envie. que tu te fasses agressée. sa voix grave n’est plus qu’un murmure dans l’air frais de la nuit. ❝je n’aime pas que l’on touche à ce que je considère comme précieux. il aurait pu, aurait voulu poser sur elle un sceau bien plus direct. lui dire tu es à moi, faye byrd. mais sa délicatesse le touche. ses doigts tirent en douceur quelques mèches pour intimer à la jeune femme de redresser le visage vers lui. ❝tu es précieuse, faye byrd. à tel point que j’aimerais que tu sois l’un de mes bijoux. qu’il puisse la polir, la faire briller aux yeux du monde en leur rappelant à la fois, fièrement, qu’elle ne peut être à personne d’autre qu’à lui.

L'aime-t-il? La désire-t-il?
Voulait-elle lui demander de revenir encore une fois, une énième fois, une éternité faite de ces instants volés ? Voudrait-elle que sa vie ne soit vécue qu’en attente de cette pourriture logée entre leurs doigts ? Faye ne comprend pas l’amour, ne comprend pas le désir, ne comprend pas ces choses auxquels on protège l’esprit, en acclamant que son seul contact rend la blancheur putride.

Mais elle le regardait, se noyait en son être et cette arrogance grasse qu’il dégageait. Tout ce qu’ils vivaient n’était peut-être pour lui qu’un jeu, elle ne lui en voudrait même pas. Les doigts fins se glissèrent entre les siens, grotesques, massifs, siens.

-Il y aura donc une prochaine fois. Et une après, et une encore après. Jusqu'à ce que tu décides de ce que je suis ou que je me décide à fuir. Mais d’accord, je te demanderai encore, dans le même lieu ou autre part.

Son ton frôlait l’espoir, la joie et l’étrange contenance maîtrisant l’assemblée des sons.

Le lieu les rendait ni femme ni homme, ni bête ni humains, ni chiens ni chats, ils existaient à l’âme luisante jusqu’aux moments où le ciel cessa d’être obscur. Dans la nuit, tous les chats sont gris. Dans la nuit, Saturne n’est pas plus différent d’un homme que Faye était différente d’une Vesperis, seule subvient la différence quand le sang est tiré.


La question impliquait plus, elle le savait. Ce n’était pas qu’une histoire de nom, Faye Byrd. Ses lèvres pincées ne trahissaient aucun doute mais ses joues brûlaient et se consumaient flamboyantes lueur dans l’obscurité. Elle voudrait le voir; à ses pieds et sur ses mains, à lui demander de prononcer son nom encore et encore, à la supplier de le laisser prendre ce qu’il avait déjà saisi.
Mais elle était celle enroulée dans l’étreinte, celle dont la taille ne laissait d’envergure que celle d’une damoiselle.

-Saturne.

Un chuchotis tendre; une peur qu’elle refuse de laisser conquérir. Parce que ce nom sonnait tiède; sonnait comme une vérité qu’on s’accorde avant de s’étioler dans les flots de la fin. Elle ne comprenait pas ce qu’il l’attirait si désespérément en lui; les vesperis n’étaient, ne devaient être que ces monstres.

Saturne était différent.
Saturne possédait ces milles voix qui lui susurraient la même mélopée.
reviens à nous.

Et ses bras l'enferment dans cette nouvelle réalité où elle était autant reine qu’esclave; objet et déesse.

Il chuchotait dans son oreille; ses mots dévastateurs. Il mêlait sa main dans le creux de ses cheveux alors comme un instinct longtemps oublié, sa main se saisit de l’étoffe de son t-shirt comme si sa volonté pouvait changer les choses des dieux. Sa chair lui appartenait, ici et maintenant.

Faye Byrd regardait le monde et ses yeux reflétaient toutes les étoiles artificielles des cieux.

-Bien.

Ses lèvres effleuraient sa joue, dansait sur la ligne de l’insolence, le baiser fantôme ou le fantôme d’un baiser sur sa peau morte.

-Un jour; tu désiras me tuer, Saturne.

Elle reculait le visage, reculait le souffle. Affirmait la possibilité émise.

-Mais chéris moi le temps que j’ai. Et je te ferai plus précieux que l’or en mon cœur.

Offre moi la sincérité que je n’aurai jamais plus, que je ne pourrai jamais plus goûter.

Il tira son visage vers lui, encore une fois et cette fois-çi elle lui sourit. Lui sourit plus doucement encore que la tendre chair des agneaux.

-Je pensais que les Vesperis prenaient ce que leurs coeurs désiraient. Si je suis précieuse, prouve le moi.

Son doigt unique, orphelin de ses volontés, dansait dans le creux de son dos. Ceci n’était qu’un jeu plus ancien qu’eux, n’est-il pas boucher? Faye ne comprenait ni l'amour ni le désir mais Arkham lui avait apprit le manque.

melodiam
tw: //
son sourire est étrange, léger. humain ? ❝ne me fuis pas, faye byrd. à mi-chemin entre une supplique et un ordre. survivrait-il à sa fuite ? est-ce finalement cette fichue ville qui le tient accro ? ou n’est-ce que la présence de la jeune femme ? il ne sait pas ce qu’elle est, ce qu’elle représente, ce qu’elle deviendra. il sait juste qu’il veut la surveiller, la protéger. encore et éternellement. quand bien même l’éternel de faye byrd soit bien trop court.

et le géant vesperis frissonne délicieusement lorsqu’elle ose prononcer de nouveau son prénom. il semble béni entre ses lèvres. il ne sonne pas pareil dans sa bouche candide. il la serre contre lui, encore plus. semble se réchauffer en sentant la main brûlante contre son dos, qui froisse son t-shirt. encore.

encore

encore

E N C O R E !

la nuit est grise. la nuit la rend pourtant reine de ce monde qui n’existe que dans l’esprit de saturne. ❝peut-être. il caresse encore, chérit de toute son âme morte et froide le feu entre ses bras. ❝mais ne parle pas en mon nom et en mes désires, faye. son regard noir se plonge dans celui de la jeune femme. il n’arrive pas à comprendre ce qu’il y voit. l’enfant ou la femme ? celle à protéger ou celle à aimer ? c’est viscéral, c’est l’unique chose que saturne atkins comprend. il veut faye byrd, de tout son être ; dans toute sa totalité et sa complexité.

❝mon cœur est mort depuis des décennies, faye. il murmure, offre des bribes de son histoire de cette voix calme et pourtant brisée. ❝ne pense pas tout savoir des vesperis. ses doigts glissent sur la clavicule de la jeune femme, courent jusqu’à sa gorge avant de finir sur sa nuque de laquelle il dégage la longue chevelure blonde. il se penche, se plie en deux au dessus d’elle pour venir caler son nez froid au creux de son cou brûlant. ❝je ne comprends encore pas pourquoi tu me sembles si précieuse, faye byrd. et il ouvre ses lèvres, laisse mourir son souffle froid sur la peau palpitante. ❝mais je tuerai chaque enfant, chaque femme, chaque homme, chaque vesperis qui osera prétendre que tu es la leur. le temps s’arrête, en suspend. mais saturne ne fait rien. recule simplement son visage avant de fixer la jeune femme. ❝alors que nous sachons tous les deux que tu es mienne.

ses lèvres viennent s’apposer contre la joue chaude de celle qui a survécu. et tout contre sa peau brûlante, le vesperis murmure. ❝tout comme je suis tien. sans savoir pourquoi. sans comprendre pourquoi. mais ça grouille sous sa peau. est-ce parce qu’elle est une byrd que ça hurle dans ses veines ? tant de questions qui restent sans réponse.

le Carnis se redresse, garde toujours un bras autour de la jeune femme. ❝veux-tu rentrer ? je ne veux pas que tu tombes malade. reste avec moi cette nuit et je te promets qu’aucun autre homme ne cherchera à t’approcher, faye byrd. promesse sanglante. ❝reste avec moi cette vie, et plus personne ne te fera souffrir. il sera l’unique avec un tel pouvoir. il le sait. le sait-elle ? tout comme elle pourrait avoir grand pouvoir sur lui. saturne, prêt à manger au creux de la délicate main de faye.

Sa présence la guidait vers les abysses, la noyait dans les flux de son existence et elle ne désirait plus respirer. Elle désirait qu’un jour, tout soit plus simple, plus violent, plus éclatant, que l’humanité et les doutes se dissolvent dans l’écume frivole des lendemains qu’on ignore. Alors elle le laissait devenir sien, devenir extension de son être. Bercée par son amour, bercée par la certitude qu’elle pouvait mourir en étant aimée par son meurtrier, elle voulait dormir.

Son grognement en son être virulent, ses yeux dans les siens, il semblait à Faye désormais qu’elle voyait en ses yeux les fantômes de son être, les duplicités coupables des itinérances perdues de son âme. Saturne renfermait les secrets de son âme et elle s’en enivrait, s’en oubliait et de ces mots prononcés, elle ne sut que dire.

Pouvait-elle affirmer qu’il se trompait? Qu’elle pouvait définir son coeur et son existence contraire ? Pouvait-elle affirmer qu’elle pouvait prédire la façon dont il allait la consommer ou s’abstenir de ? Pouvait-elle affirmer qu’elle serait triste d’être tuée, heureuse d’être massacrée, soulagée d’être vivante?

La seule chose qu’elle pouvait dire, la seule chose qu’elle pouvait prononcer
C’est combien elle aimait la cruauté de ses gestes, combien elle aimait comment il la tenait.
Comme si par sa présence seule il lui interdisait de s’envoler, s’enfuir, elle n’était que sa petite colombe aux pattes lestées.

Alors elle lui sourit.
Car elle l’aimait.
Lui, son charmant assassin.

Il la faisait frissonner de ses doigts baladeurs, de la danse entre les boucles blondes de sa chevelure. Et l’anticipation la fit trembler, ses lèvres si proche de sa carotide, d’un coup de dent, elle pouvait s’effondrer et il ne resterai d’elle qu’un titre imprimé dans une encre douteux sur un papier misérable. Le tenant toujours dans ses bras, elle contemplait sa chevelure de jais, laissant ses lèvres effleurer les mèches de kératine morte, le bénissant dans son crime, l’acceptant dans son horreur simple.

-Je ne sais rien de plus que ce que tu me dis, Saturne. Tu es mon absolu.

Sienne.
Ah!
Une brûlure dans son coeur, des larmes berçant le coin de ses yeux, et sa poigne se fit plus intense. Chérie, désirée, tordue, jetée, elle lui reviendra. Car elle était sienne et qu’elle avait besoin que quelqu’un la réclame, saturne plus qu’un autre, saturne comme le pilier de sa nouvelle essence. Et sa rougeur rendait son regard fiévreux, tendre quand il l’embrassait comme on embrasse une amie, une sœur, une amante, un petit chat.

-Merci Saturne. Merci beaucoup… J’ai vécu en attendant que tu dises que j’étais à toi et en attendant que tu sois à moi.

Et sa main en coupe, chérissait sa joue, repoussait les cheveux derrière l’oreille, lui confiait milles trésors de paix pour que l’instant cesse d’être la cause d’un destin odieux.

Il lui proposait de rentrer et elle regardait la ruelle, regardait le sang versé en son nom, regardait la figure de Saturne, et sa petite main prit la sienne, libre et grandie.

-Je veux rentrer, tu viens avec moi ? J'aimerais que tu me parles de toi, que je sache quelle couleur tu aimes et quelle musique te plait, j’aimerai que tu me donnes une petite vie de toi à conserver et à rêvasser.

Ses yeux dans les siens, dévorants.




Et elle le jurait tendrement entre ses souffles perdus, d’un pas vers la sortie de ce lieu.