Les premières missions, celles où Ellair Li suit ses ainés et obéit à chacun de leurs ordres. Petit soldat parfait et impatient, ses premiers vesperis tués, sans aucune pitié pour un blanc bec. Et le soir il prie Mens, prie que les arcanes l'observent et guide sa main, et peut être, le trouve suffisamment digne.
Leurs pas les mènent derrière la gare. Leur mission est finie, il est tard. Le vesperis n'aura pas été retrouvé, mais bien des sbires d'une génération récente. Un travail fatiguant, mais terminé. Armes rangées pour la plupart, c'est un retour qui se fait sereinement. Ellair garde un couteau papillon, lui, distraitement, plus pour garder quelque chose en main, jouer avec sur le retour.

Pas plus de violence, ce soir, c'est ce qu'il croyait. Qu'il allait pouvoir rentrer tranquillement à la maison, et reprendre demain comme si de rie n'était. Alors, le jeune épée ouvre la voie, laissant les deux anciens derrière.
Puis on le pousse.
Ellair s'écrase au sol, pour voir à sa place un des épée qui l'accompagnait, et un Vesperis qui lui tombe dessus de nulle part, puis le sang. Pas le temps pour la surprise, ou juste assez pour avoir une réaction retardée. Pas sûr que ce soit encore un Vesperis, la seule certitude c'est le danger.
Ellair tend le bras en urgence pour rattraper son arme, tombée à ses côtés, puis se redresse et va pour entailler le mollet de l'assaillant.

Pas le temps de réagir assez tôt, malgré la tentative d'esquive, le couteau se plante quand même dans sa chair. Le jeune épée grogne, se retient de retirer l'arme d'un coup  sec par colère. Qu'il y reste, empêche le sang de s'échapper de trop !

La douleur le motive à se relever et montrer au monstre qu'il y a plus osé encore.
Il peine, doit poser le genou avant de pouvoir se relever de tout son long. Son mentor a eu le temps de sortir son arme, garder le vesperis à distance. Ellair jette un coup d'oeil au premier, qui lutte, main pressée contre sa gorge, mais colmate si peu.
Peu de chance de s'en sortir.
La rage monte, et le jeune se détourne pour profiter que le vesperis ait le dos tourné pour le tacler, offrir une chance à son mentor pour lui infliger un coup d'épée s'il en a l'occasion.
Quant à Ellair, il aurait aimé s'écarter juste après, mais le couteau gêne. Se désengager n'est pas si simple, ce n'est qu'un maigre pas en arrière de fait.
Ca laisse l'occasion de fusiller l'adversaire du regard.
D'être dégouté par son visage, par l'odeur de sang et de clope.
Rien que ça c'est un crime pour lequel Ellair n'aurait pas  manqué de le punir.
Alors maintenant qu'il est à portée, la nouvelle recrue serre les dents, serre les poings, encore le couteau en main, se prépare au pire ou à la moindre opportunité.

De nouveau une douleur vive qui le transperce quand le couteau est retiré de son flan. Le temps de se redresser, l'ainé est déjà touché. La soirée s'était pourtant si bien déroulée, la mission avait été un succès.
Elle tourne au désastre, à cause de toi.
Tu lui apprends le dur quotidien des épées après une enfilade de succès. L'odeur de la mort, les bruits aussi, cela lui déplait. Ton allure également, couverte d'un liquide qui ne t'appartient pas.

Ellair te toise, serre bien son arme, lame d'argent, entre ses doigts.
Ton genre ne mérite aucun mot de sa part. Il jauge, grimace, tâche de se concentrer sans foncer de rage pour te transpercer jusqu'à ce que la fatigue l'en empêche.
L'envie y est.
Peut etre quand il t'aura mis au sol.
Alors, il faut faire vite. Ellair s'élance pour feindre, prétend attaquer à gauche pour venir plutot donner un coup pour lui couper le souffle; pauvre bleu, il ignore qu'il s'agit d'un carnis. Cependant, ses idées ne s'arrêtent pas là : bien que le résultat escompté ne se produit pas, ses traits se froncent d'avantage. La lame vient chercher l'épaule de l'ennemi.
Elle se veut rapide, car tu as résisté son coup.
Et pour éviter le sien, il n'y a plus qu'à espérer être assez rapide.

Ellair n'avait pas vu le reflet d'une lame approcher son visage : il n'y en avait tout simplement pas eu. Ce n'était qu'une malheureuse main, qui trop vite s'est glissé sous sa peau. Tu es a la meilleure place pour lire sa confusion, et quand Ellair comprend seulement ce qu'il lui arrive -quand quelque chose tire, de l'intérieur, retournant son estomac, couvrant l'épée de frissons-, c'est déjà trop tard.
Le corps veut s'effondrer, mais l'adrénaline le rattrape d'un pas. Ellair est quant à lui sonné. La moitié de son visage le démange. Il ne sent même pas le sang couler, juste le contact froid de l'air avec.
Absent, quelques secondes.
L'oeil restant fixe le poing brandi, rouge, doigts entourant sa propre relique. Le sourire du vesperis apparait finalement dans son champ de vision, et le feu au fond de la moitié de son regard le consume entièrement.

Balthazar n'aura comme réponse qu'un cri.
Ensuite, ce n'est que rage.
L'animal se jette sur le vesperis, couteau serré entre ses doigts au point d'en blanchir les phalanges. Ellair fait face aux premières difficultés d'une vision amoindrie, mais c'est à peine réalisé; ses dernières forces sont juste là pour trancher, déchirer, essayer de sa main libre d'attraper l'oeil qu'il devine dans son poing.
C'est le sien.
Il pourrait l'y remettre !
Alors il enchaine et encaisse, grogne lorsqu'il se relance à corps perdu vers son assaillant. Il le mordrait s'il le fallait.
L'emporta avec lui quoiqu'il en coute, pour Mens.
Et surtout, hors de question de mourir en lui offrant la satisfaction d'avoir son oeil comme trophée.

Il l'a mangé.
L'oeil, son oeil, il a été gobé.
La seconde passé immobile devant le choc semble longue, et ce qui coule de ses lèvres ne peut pas venir de lui, pas vrai ? Il l'a rêvé. C'est récupérable. Oui, s'il le rattrape, il verrait comme avant ! Pourtant ses yeux son oeil est horrifié et furieux à la fois, eux comprennent exactement ce qu'il vient de se passer et ce que cela implique.

Un jour, il viendra chercher le deuxième.
Alors il s'élance à nouveau, voit rouge. Rencontre le sol brutalement. La douleur ne l'arrête pas, le ralentit tout au plus. Ca souffle sa rage, puise dans ses dernières forces. L'envie de l'étriper, ça le maintient en vie. Il plongera ses mains, arrachera la peau pour sortir de cet estomac moisi l'oeil qu'on lui a volé.
Ellair se relève et voit le vesperis déjà loin. Il grogne, force son corps à le suivre. Il ne verra qu'un bout de la moto avant de finalement s'effondrer, tremblant.
C'est l'épuisement. Le sang perdu. La colère.
Mais il reste juste assez pour appeler Regeneratio, soupirer un nom de rue en suivant désespérément la moto des yeux de l'oeil.
Après ?
Ellair ne sait plus.
Il a tenu encore quelques minutes, avant de perdre connaissance. Il sera retrouvé à temps, et aura tout le temps d'être désespérément en colère après cette rencontre.