A vrai dire : oui.
Gabriel ne pensait impossible qui lui soit accordé autre chose qu’un mensonge, que quelque chose de factice.
Ce n’est pas tant qu’il imaginait Colombe comme une personne dénuée de sentiments, bien loin de là, mais il n’avait jamais envisagé que ces derniers lui soient adressées à lui, spécifiquement.
Parce que Colombe est ce qu’il n’est pas.
Rigoureuse, habile de ses mots, admise par le plus grand nombre comme un excellent envoyé de Mens.
Colombe était courageuse, elle.
Qu’elle puisse s’éprendre de sa personne - même s’il n’eût s’agit que de son corps, c’était difficile à admettre.

Mais Gabriel se laisse porter par ses mots, par la tourmente qu’elle prétend lui causer, pour l’obstacle qu’il pouvait bien représenter à son serment, à ses vœux.
Pourtant ils étaient tous deux dévoués à Mens et ses traditions, la lutte contre les Vesperis et l’organisation encourageait férocement ses dévots à construire le futur des Arcanes en offrant des progénitures elles aussi dévouées à la cause.
Était-ce vraiment un crime de vouloir froisser la soie en sa compagnie ?
Il s’en berce, en tout cas.
De sa voix, de ses mots, de l’autorité qui se dégage de son regard.
Comme si elle savait ce qu’elle faisait, ce qu’elle demandait.

Ce n’est pourtant pas par obéissance qu’il plaque ses lèvres contre les siennes mais bien par envie.
Une envie dont il témoigne à travers son mouvement, tendre mais appuyé.
Aurait-il seulement considéré cette éventualité il y a encore deux semaines de cela, quand il inventait le visionnage d’un film pour lui dissimuler ses activités nocturnes ?
Quand la confiance s’étiolait encore en des sarcasmes ?
A présent, Gabriel s’offrait.
Et ça faisait du bien de ne plus être tout seul, même si ça n’était que pour l’espace d’un baiser.

Le chevalier s’abandonne à la tendresse, ses genoux viennent rejoindre le sol là où il était plus confortable.
Son regard, adoré contre le sien, désormais relevé.
Quand les lèvres se quittent, c’est dans un souffle emprunt d’une tendre chaleur.

J’imagine que tu devras accepter la punition, alors. Et j’accepterais la mienne aussi.

L’union n’était pas toujours sans conséquences.

Je n’ai plus envie de fuir et je n’ai pas non plus envie de continuer à faire semblant de me battre.

De faire semblant de chercher la Bergerie pour trouver un endroit où mourir.
Maintenant, il ferait l’effort de se battre pour de vrai.
De vivre, pour de vrai.