Heureusement il l'entend. Ellair arme son coup, mais c'est déjà trop tard; la lance lui fait lacher l'épée, son poignet est pris au piège. Ellair ne l'avait pas vu venir. La frustration tord les traits de la moitié de son visage : le reste est encore sous des compresses. On lui a dit que c'était fichu, qu'il avait de la chance de pouvoir garder le globe oculaire fiché là.

- Je vais très bien.

Il perd du temps dans son lit.
Il y veut tout casser. Il veut se battre, tout le temps, se venger.
L'épée ramasse son épée et se remet en position. Il n'y a qu'à le garder du bon coté, et rien que d'y penser, cela l'enrage.

- Me ménage pas.

Il avait besoin de se rendre compte de ce qu'il a perdu. Puis, il fonce sur Fu Shen, échange quelques coups avant d'essayer d'y mettre plus de force pour écarter cette lance et franchir l'allonge.

Rien ne l'alarme au début, mais Ellair reste tendu.
La feinte ne prendra pas, c'est ce que se dit le jeune homme blessé, et pourtant... Il tombe droit dans le piège de Fu Shen, perd son souffle dans un grognement sourd.
Fu shen a disparu.
Obligé de tourner la tête, montrant les crocs de rage; sa faiblesse avait été exploitée si vite, il ne l'avait pas vu venir (rires).
Et encore, il se voit obligé de lâcher son arme, avant de tomber au sol comme le perdant qu'il est.
La lance menaçante, et au bout, le vainqueur. Le borgne l'observe, encore en colère. En colère contre le vesperis qui lui a infligé cette faiblesse, en colère parce qu'il est devenu une proie facile, que Fu Shen n'a plus de difficulté contre lui.

Il écarte la lance brusquement, sans se soucier de si elle fendille la peau ou non. Ce n'est qu'une blessure de plus, et dans l'immédiat, il s'en fiche. Il taperait jusqu'à s'évanouir s'il le pouvait.
Il se relève, la bête fulmine et ne prononce aucun mote. Elle ramasse son épée, puis se remet en position, attend de Fu Shen qu'il fasse la même. Puis fond sur lui. Cette fois, ce sont des coups puissants. Peut être pour le déstabiliser, peut être pour évacuer la frustration.
Ellair ne veut lui laisser aucun répit, cette fois, veillant à punir chaque déplacement vers la droite, quitte à laisser des ouvertures.

Fu Shen chancelle, et cela motive le grand blessé à continuer, peu importe si son corps est encore fatigué de l'embuscade. Le son de sa lance malmenée par son épée le revigore, Ellair en veut plus.
Mais ce n'est que joie temporaire.
L'épée est bloquée, son bras, ensuite. Ellair grogne, puis se retrouve immobilisé, sa propre arme retournée contre lui. L'humiliation, alors qu'il s'en sortait enfin.
Comme s'il 'y avait pas d'issue.
Se débattre ne se sert à rien tant que son bras est tordu, alors il restera là, malgré la proximité, attendant qu'on le relâche; il attend également que la colère descende, mais elle bouillonne. Elle réclame plus de violence encore.

Fu Shen lui en offre une, alors qu'il rageait déjà.
C'était le moment de causer ?
Là, contre Fu, c'était le moment des confessions ?
Mais ses mots le surprennent, et lui font oublié cette prise qui dure.

- ... Quoi ?

Il se tait ensuite, prenant le temps de réfléchir.
Puis un râle et il tire légèrement ce bras -Fu Shen l'aura surement laissé partir-, se libère et ramasse l'épée.

- Être borgne c'était pas assez pour toi...

Pourtant, l'arme est dans la main gauche.
Le jeune blessé soupire, et se positionne, bien moins certain qu'auparavant.

- Et si c'est une perte de temps ?

Cela le tuerait, de prendre du retard sur les autres épées.

Le blessé souffle du nez. Jamais assez, et lui, il continue d'essayer. Le corps supplie un peu de repos, mais le jeune homme reste sourd. Il s'effondrera avant de s'écouter.

- ugh...

Il joue avec cette épée, teste l'équilibre qu'elle a dans cette main inhabituée. Heureusement, ce n'est plus qu'un couteau avec lequel se bat Fu Shen. Ce n'est qu'une petite arme, qui pare sans mal la sienne et sa force. Plus il essaie de l'écraser, plus les étincelles brillent, sans pour autant gagner du terrain. La main tremble, trop faible.
L'épée tombe, par la faute de son adversaire.
Un regard assassin échangé, puis c'est le poignet qui est prisonnier, et le sol l'accueille d'un coup. Ellair se relève vite, c'est la seule chose qu'il sache faire
Et tombe dans son piège, souffle coupé.

Il bloque, mais Fu Shen revient à la charge. Tombe encore, et l'épée n'est plus à portée. Mais Ellair n'a jamais appris à abandonner. Plus les coups lui tombent dessus, plus il a la hargne. Ami ou non, Fu Shen le cherche de trop. Il veut voir sa main gauche de manière offensive ?
Oh, il allait la lui donner !
Ca gronde, la patience épuisée. Parer les coups ne revient plus seulement à les bloquer mais  à agripper l'adversaire, l'attirer à lui -l'empêcher d'éviter- et lui en coller une pour le sonner. Plus d'élégance pour lui, juste la colère et la frustration qui s'extériorise. Une baisse technique, il est vrai, mais Ellair a perdu un oeil, et ne veut que frapper.
Une autre, vite, pour la bonne mesure, parce qu'il la saoulé. Le relâcher, et profiter de la portée pour tenter un coup de pied retourner; parier sur sa proximité pour ne pas avoir trop besoin de se reposer sur la vue. Surement, Fu Shen l'aura éviter, habile comme il est. Mais Ellair n'est pas à court d'option, et cette échappatoire l'agace au point de finir par simplement foncer droit sur lui et le plaquer au sol. Bloquer ce qu'il peut de ses bras, et continuer de lui montrer que le poings gauche pouvait attaquer.
Les traits du visages qui tremblent, le maudit poing aussi. Il le voit bien, là, mais plus autant qu'avant. Comment servir Mens dans cet état, quand Fu Shen l'éclate au sol à répétition ?

Au sol, encore.
Ca grogne, et grimace légèrement, ses cheveux en plein visage. Ellair attend les coup, mais rien ne vient. Son visage se détend légèrement, bien que les sourcils restent froncés, encore dégouté de perdre autant. Alors il souffle, tentant de dégager ces cheveux trop proche de ses yeux, son oeil, en fait. Lui aussi la respiration se fait lourde, à force de ne retenir aucune force.
Les yeux s'attardent aux lèvres : il a visiblement bien blessé son ami. Heureusement, c'est leur langage à eux, Fu Shen ne lui en tiendra pas rigueur.

Une moue comme unique réponse.
Oui, ça le fait chier.
Puis il s'approche, réduit la distance entre eux. En combat, Ellair n'y avait jamais trop fait attention, mais là, il a bien le temps de voir le visage de son ami -avec un oeil il regarde plus en détail, par peur de le perde à son tour et ne plus pouvoir détailler qui que ce soit-, de se plonger dans son regard. Cela le calme peu à peu, les mots qui suivent aussi, bien qu'ils blessent. Le jeune homme roule la tête sur le côté comme si cela pouvait prétendre à ne pas entendre la dure vérité. C'est perdu. Ca l'agace et en ne voulant pas le lui montrer, fuyant le regard quelques secondes, la mâchoire serrée, c'est encore plus évident.

Puis, doucement, il hoche la tête.

- Oui...

Est ce que c'était seulement audible tellement c'était étouffé ? Il soupire, et son regard ose enfin lui revenir et soutenir ces yeux qui pétillent comme s'il n'avait pas devant lui un soldat qui a perdu toute sa valeur.
C'était le seul adversaire dont il avait besoin là tout de suite, et offre bien plus au blessé qu'un moyen de se défouler.
Fu Shen le connait trop bien, a su gagner sa confiance, et jour après jour, un peu plus encore de son respect.

- T'es chiant.

Un beau compliment à ses yeux.

Toute la grimace s'évapore en un sourire. Il a essayé de le retenir, mais les mots de Fu Shen sont juste trop forts. Adorable, dit il ! Encore un peu et il aurait éclaté de rire, l'animal.
Sa main rejoint la sienne, et s'en aide pour se relever. Ah, sa temple ! Il réalise seulement maintenant que lui aussi se retrouve dans un sal état, que ses coups de genoux lui font encore grincer le torse; maintenant que la rage est basse, il le sent.
Comme promis, il ne l'a pas ménagé.

Et il le garde dans son champ de vision, l'acolyte fidèle échevelé et blessé, plein de reconnaissance au fond de l'oeil. Elle est gardée pour lui, et balayée de son esprit lorsqu'il lui demande d'en savoir plus sur ce qu'il voit.
Ellair soupire, se tient un peu plus droit.
Fu Shen à sa droite, il se tourne jusqu'à ce qu'il ne l'aperçoive plus. C'est l'affaire de plus de trente pourcent de son champ de vision qui saute à sa droite. En regardant tout droit, il pourrait facilement manquer quelqu'un qui mache vers lui par sa droite.

- Là, je ne te vois plus...

Et il reste ainsi.
Fu Shen avait tout le champ libre pour l'attaquer, il ne s'en rendrait même pas compte. Il garde pour lui un énorme soupir, force à nouveau ses mâchoires pour garder toute cette rancoeur pour lui.
Le visage du vesperis, encore on ne peut plus clair dans son esprit.

- Fu Shen.

Les poings serrés eux aussi.

- Tu m'aideras à le retrouver ?

Et l'oblitérer comme il se doit.
Oeil pour oeil, et pire encore.

A deux, aucun doute que ce vsperis aura la fin tragique qu'il mérite. Empalé, énucléé, et pire selon le mood du moment. Ce monstre lui inspire moult tortures, le voilà soudain imaginatif.

Ellai récupère les armes, les soupèse, puis joue un peu avec. Son visage reste grognon : la main gauche ne vaut pas la droite, et il redoute déjà les semaines, les mois à venir pour oser prétendre être ambidextre.
Puis il observe, écoute même, Fu Shen donner ses explications. Son regard va de lui à la dague, à l'épée. Fait plus attention au point. Plus difficilement, jauge la profondeur de chacune des lames. Et ça le prend à la gorge. La haine, la peine.

-Hm...

Un râle insatisfait comme réponse.

- Ok...

Quelques pas, tournant autour de Fu Shen, réduisant la distance peu à peu. Dans le sens contraire des aiguilles d'une montre : l'oeil gauche qui voit tout, le droit laissé à l'extérieur de sa rotation.
Puis il glisse, frappe d'un coup d'épée. C'est à peine plus lent, mais par habitude, l'allonge de l'épée ne lui semble pas si compliquée à gérer.
Pour le moment.
La dague par contre, arrivant après les quelques coups qui prenaient en assurance, manque, frole les habits. Il suffit que Fu Shen recule dans l'axe de la profondeur imperceptiblement que meme son épée le manque de peu.
Alors, le masque sourcils foncés revient, prêt à retrouver les babines et montrer les crocs de frustration. Et puis merde. Ellair réduit la distance, oublie la distance pour frapper fort, juste un peu !
Il veut pouvoir voir Fu Shen chanceler, juste un peu.

Puni, encore.
Grimace alors, râle, gronde plutôt.
Et il a raison Fu Shen, il a toujours raison.
Même si c'est exactement ce qu'il pensait faire, forcer, retrouver la force brute et se prouver capable de lui faire lâcher au moins une main de cette maudite lance. Il la pousse avec ce qu'il pense être une violence contenue, s'en fichant si elle laisse une nouvelle marque sur sa peau. Rien ne sera pire que celle qui git sous les compresses, celle qui le dégoute chaque matin et chaque soir.

Il s'écarte, se soustrait à sa compagnie quelques secondes pour juste faire des allers retour comme un fauve en cage. Non, il ne compte pas pleurer. Juste faire sortir ce trop plein d'une façon ou d'une autre, et frapper ne fonctionne plus.
Puis il revient, la tête haute.
Serre ses armes dans ses mains.

- Tu te ferais chier si je crevais.

Et il se met en position, souffle d'un coup sec, expire la colère, et fixe son adversaire. C'est triste, parce ce qu'il est convaincu qu'il n'est pas si loin. Qu'en deux pas, il pourrait la lui coller sous la pomme d'adam, la dague. Ca se trouve, c'est trois.
Sa se trouve, ses blessures se rouvriront d'ici la réponse.
Tant pis, il préfère salir les tapis plutôt que de croupir dans sa chambre. Alors, il s'élance, moins rapide, plus concentré. La lance l'empêche de résoudre l'énigme, et c'est elle qui la gêne le plus avec ces histoires de distance.
Il suffit qu'elle aille à sa droite pour le coincer, le forçant à se concentrer ailleurs et perdre tout les repaires qu'il lutte à établir ! Alors il jure, pare du mieux qu'il peut, mais galère à le toucher lui.

Petit sourire satisfait.
Certains mots on besoin d'être dit à ce moment précis, ceux là par exemple.

Et leur danse reprend. Ellair n'a  plus le temps pour les  mots, ne l'a jamais vraiment eu, et parfois les prononcent pour toi quand même. Certains méritent l'effort, comme tu fais l'effort d'être patient avec Ellair.
Et il le rend bien : concentré, il essaie de faire ce que tu lui as dit. Et il grimace encore quand il rate, perde de vue la lance ou rate la pose de son pied. Mais toujours droit, toujours présent. L'épée revient et bloque, repousse. Ellair mange la distance parfois pour mieux coincer le manche, tente avec la dague de te forcer à te déplacer à ton tour, surtout si tu essaies de disparaitre de son champ de vision.
Tu y seras toujours le bienvenue, alors tu y restes.

Au détour des entrechocs, son regard rencontre le tiens. Y lire la malice le fait sourire. Ce sont les meilleurs encouragements possibles, car il avait eu peur de t'ennuyer maintenant que tout est à réapprendre.
Et bloque, enfin, la lame dansante qui voulait de son flanc, celui qui n'existe plus à son oeil. Un léger souffle expiré, satisfait. Quelques secondes, à partager cette victoire avec toi dns un sourire discret mais complice. A son tour, les yeux- L'oeil brille.
Puis Ellair lui renvoie sa lame. Cette fois, plus vite encore ! La fatigue pèse, et il veut une dernière danse avant de retourner à l'infirmerie.
Le borgne se retient de s'emballer, mais s'impose, essaie du moins. Essaie de gêner Fu Shen, de retrouver l'habitude de surveiller ses pas pour punir le prochain.

Ça y est.
L’ennemi vacille, et sa foi s’embrase à nouveau. À nouveau digne de Mense, digne de se battre avec Fu Shen. Il perd en puissance, mais il tient le rythme, peu à peu arrive à voir ce qui lui manquait; tourner la tête quand il le faut, rediriger tout vers le centre du champ de vision.
Mais le corps demande de l’énergie.
Bien vite, il retrouve le sol, en chutant à nouveau.

Ellair lache les armes et soupire. La lame sous le menton devient une habitude. Il observe depuis sa place le grand vainqueur. S’imagine que demain, ce sera l’inverse.
Puis il sourit légèrement à son offre.

- Ok.

Roule sur le côté, et se relève lentement, fatigué.
Range les armes et revient vers son camarade. Sans lui il serait encore en train de s’entraîner dans le vide, d’être en colère et perdu.

- merci, Fu Shen…

D’être là.
Sa foi seule pour Mens ne l’aurait pas sauvé de ses doutes.
Quand il passe près de lui, il le bouscule légèrement, léger coup d’épaule comme signe de reconnaissance.

- on reprendra demain ?