// flashback, été 2023.

C’est au détour d’un couloir que l’idée avait éclos ; comme une idée ingénue, motivée par la douceur des beaux jours (ah ! ce serait amusant de déjeuner dehors, par ce temps, et les jours sont longs), puis la perspective s’était, au fil de la conversation, drapée d’une substance réaliste (pourquoi pas, après tout – on se retrouve après le travail ?).

Le béton est brûlant, l’atmosphère épaisse et chaude l’enveloppe de ses bras solaires et presque étouffants, tant et si bien qu’il trouve avec un bonheur non feint la fraîcheur maintenue dans le parc, sous les hautes verdures et à proximité des étangs qui le jonchent. Quelques emplettes faites sur la route balancent à son bras dans un petit sac, et il marche un temps avant de se laisser choir dans un coin d’herbe, la pente légère donnant sur le reste du parc, le lac plus loin, les badauds en contrebas. Les rires des enfants et les éclats des parents, partout autour.

Au pied d'un haut chêne, il extirpe son téléphone de sa poche et tapote quelques mots pour signifier sa position à celle qu'il est venue retrouver ce soir (je suis là, au pied du vieux chêne, entre le lac et le croisement à l'est, tu sais, là où ils vendent les glaces). Là, il se laisse choir dos dans l’herbe, les paupières fermées, inspire – expire. Il ne se laisse pas envahir par le sommeil, mais pourrait, presque. La caresse de l’astre solaire le dorlote confortablement. Alors, il pourrait presque se croire, l’espace d’un court moment, mener une vie différente de la sienne : connaître l’insouciance d’une vie loin des tracas que sont les leurs, ne pas s’épuiser dans une vaine course contre le temps, et dans un combat millénaire. Les oiseaux piaillent non loin, il entend une éclaboussure – en déduit que ce sont des mômes qui jouent. Il sourit.

A sa joue, soudain : le froid. Il grimace, un bref sursaut l’arrache à sa semi-torpeur nonchalante. Ses yeux s’ouvrent sur la figure malicieuse de Saoirse. Il lui jette un regard faussement courroucé, ennuyé, vite balayé par son rire en écho au sien. Ses doigts se referment autour de la canette avant qu’elle ne l’écarte – finalement, le frais n’est pas si désagréable. Ils sont simples ces moments, autant que rares. Ils dénotent du reste de son quotidien par leur évidence toute légère qui le décharge du poids de l’inquiétude à ses épaules.

Il se redresse, époussette sa chemise de lin, légère, flottante, froissée par son semblant de sieste à même l’herbe fatiguée par l’été. Ses yeux roulent, il balance nonchalamment la tête en arrière, des lueurs mutines dans le regard.
— Peur des bestioles, Saoirse ? Il taquine. Il cherche. Il est léger, jamais mesquin. En réalité il ne bronche pas, la laisse faire, l’aide à lisser la nappe. Merci. Tu penses à tout.
C’est son métier – le sien aussi. De penser à tout, tout le temps, pour tout le monde. D’être à l’affût, veiller sans cesse, donner de sa personne pour une cause plus grande qu’eux. Mille fois plus grande qu’eux. Pensée vertigineuse.

Il tire à son tour ses propre emplettes vers eux, dans le petit sac de toile – quelques fruits achetés en route, un paquet de chips, des tomates-cerise, entre autres. La banalité de l’instant le touche.
— Ça va, il répond dans un haussement d’épaules flegmatique. Semaine chargée, mais – eh, le soleil brille. Anahi va bien. Si seulement l’astre pouvait briller sans interruption, noyer le monde dans ses rayons d’or liquide pour toujours – leurs soucis s’évanouiraient aussitôt. J’ai enchaîné les réunions – puis… les affaires habituelles, tu sais ce que c’est, il rit doucement, ne souhaite pas l’assommer de ses dernières recherches, ses interrogations qui grouillent.

— Et toi, alors ? Entre ses doigts, il fait craquer l’opercule de la cannette – un sifflement bref – et la tend à Saoirse. Ah - attention, j'crois qu'elle a été secouée.

Le soleil rougeoie, bientôt il entamera sa course vers l’horizon et ira s’engloutir derrière les immeubles, plonger la ville dans son ombre carmine – puis viendra la nuit, et avec elle les monstres qui se nourrissent de la pénombre. Pour l’heure, Leon n’y songe pas : la légèreté de la conversation, l’atmosphère chaude et joviale de l’été, l’écho des rires environnants, le tirent dans une confortable candeur. Il l’accueille sans broncher, et avec prudence, car il sait que le candide n’aura jamais le loisir de s’éterniser tant que leurs vies seront ainsi régies par une guerre sans fin.

C’est ainsi qu’il s’est construit : façonné par regeneratio et pourtant nimbé de doutes, obéissant à chacun de leur préceptes et pourtant, toujours craintif. C’est ainsi qu’il a eu Anahi, âme printanière qui régit depuis quelques années son quotidien et n’aura de cesse de l’attendrir. Il s’agissait d’un devoir, précipité peut-être : celui de prolonger l’héritage de ses parents, motivé par l’espoir vacillant que ce combat ne sera peut-être pas vain. Il le craint – mais se refuse à y croire tout à fait, depuis qu’Anahi enjolive sa vie.

Il hoche pensivement la tête, ses cils papillonnent vers le lac.
— C’est important de se dégager du temps. Sinon – ah, sinon, je perdrais la tête je crois bien.
Haussement d’épaules nonchalant, l’air serein. Factice, peut-être.

Il observe ses gestes avec attention, et ne peut retenir un murmure admiratif devant l’étal de petites choses, minées d’attention et de soin, préparées par Saoirse. Penaud, il observe ses quelques emplettes, qui font pale figure en comparaison. Mais ce qui lui arrache un regard surpris, ce sont les mots qu’elle lui adresse alors. Son rire, tendre, ricoche maladroitement.

— C’est gentil. Il fallait pas. Raclement de gorge. Et ça a l’air délicieux. Anahi sera contente. Une idée le traverse. Tu sais, il fait en désignant du menton ses propres emplettes, je n’ai pas bien eu le temps de préparer quoi que ce soit aujourd’hui, il avait fait le chemin directement depuis le bureau jusqu’au parc, mais un jour je t’inviterai à dîner, je suis bon cuisinier il paraît. Un clin d’œil vient souligner son propos, tout à fait ignare aux exactes préoccupations de Saoirse. J’en parlerai à Anat, ce serait l’occasion de faire ça en famille. Aveugle maladresse.

— Si le cœur t’en dit, évidemment.

Il y a un flottement dans l’air, que Leon devine à peine mais n’interroge pas. Il s’efface aussitôt qu’il s’est soumis à sa conscience, alors il songe qu’il a dû l’imaginer, et le doute s’étiole dans l’air caniculaire. Il observe avec une certaine tendresse les attentions de Saoirse, qui se révèlent tant dans la minutie de ses préparatifs pour leur pique-nique que dans chacun de ses mots.

Un rire flotte à ses lèvres, il secoue la tête l’air de dire tu es trop modeste. Il y a quelque chose de touchant dans son attitude, un il-ne-sait-quoi qui l’attendrit. A ses lèvres, il porte sa cannette de soda, dont la fraîcheur salvatrice lui arrache une mine satisfaite. Et il opine, bienheureux que Saoirse accepte son invitation. Il songe – un instant. Secoue la tête, pour dire non.

— Pas d’allergies, non. Toi ? Fasciné par sa capacité à toujours devancer les besoins de chacun, son infaillible attention vis-à-vis des autres, qui lui semble si naturelle – innée. Mh. Je fais de très bon empanadas, et les viandes marinées au chimichurri, confie-t-il dans un haussement d’épaules. La mention de ces plats le ramène dans la cuisine de ses parents, alors qu’encore haut comme trois pommes il se hissait sur la pointe de ses pieds pour observer ce qui se tramait sur le plan de travail enfariné. Le parfum d’un souvenir lointain se languit à son palais. La nostalgie est cruelle. Ce monde n’existe plus. Mais je te garde la surprise pour dîner, eh.

Au cœur de la conversation, c’est la famille qui gonfle chaque mot, qui s’immisce entre chaque lettre, dans le moindre soupir et même dans la mélancolie de ses souvenirs. Alentours, aussi, les parents s’agitent autour de leurs mômes aux rires immenses. Paysage curieux, pourtant si évident.
— Tu sais, parfois – j’aimerais bien avoir une vie simple comme ça, il désigne du menton le va-et-vient du monde en contrebas, de celles et ceux qui ne se soucient pas des monstres tapis dans les ténèbres et de la course contre le temps que eux mènent chaque jour. Pas toi ?

--- Mh –  la tarte au citron, il sourit, tandis qu’en son fort intérieur il se fait la promesse tacite de faire découvrir à Saoirse ces spécialités qu’elle ignore, et dont la seule évocation le plonge dans une nostalgie doucereuse. Le soleil d’Ushaia est le plus doux.

Un souffle tendre enveloppe l’instant, baigne leurs âmes dans son écrin de félicité : le sentiment d’une existence aux accents simples frissonne au bout de leurs doigts. Et si elle n’est jamais qu’un mirage, une chimère après laquelle il est sans doute vain de courir, se laisser aller à en formuler l’espoir, le mélancolique rêve, est une accalmie suffisante à son cœur.

Il écoute – ses envies, ses souhaits formulés assez tendrement, et opine.
— Ça t’irait bien, je pense. Il n’a pas de mal à l’imaginer parcourir le monde, pour une profession ou une autre ; lui-même aurait pu y songer. Moi ? Eh, médecin ça me va bien, finalement. Après ces longues années d’études et l’investissement de tout son être dans sa voie, il peine à entrevoir autre chose à l’horizon. Mais j’aurais aimé travailler les animaux aussi. Peut-être vétérinaire ? Je crois que ça aurait pu me plaire. Il songe, un instant. Tant que je peux être utile.

L’idée de ne pas l’être lui est impensable – étrangère à son fonctionnement. C’est dans sa quête de les sauver tous qu’il s’est construit. Pourtant, dans une réalité autre, sans cette fatalité narguant leurs vies, aurait-il véritablement poursuivit la même voix ? Il l’ignore – ne peut prétendre à autre chose.
— Mais, il fait, tandis qu'un air plus sérieux qu’à l’accoutumée trace une ride fine entre ses sourcils, tout ce qu’on fait… j’espère que les générations futures en verront le bout. Raclement de gorge. Pour de bon. L’injustice de devoir jeter encore, encore, encore, de jeunes âmes dans la fosse au lion l’inquiète. Et pourtant – il poursuit cet héritage.

Un rire – tendre. La conversation reste légère, malgré l’évocation de l’abrupte réalité qu’est la leur. Il répond à son accolade par un sourire. La félicité peint sa figure, tire candidement ses traits dans une expression toujours sereine. Il chérit précautionneusement cet instant, comme une seconde de répit chipée à la volée, dérobée à la course du temps et aux monstres de la nuit.

Mais une autre vie aurait-elle vraiment été plus tendre ? Leon l’ignore, car il n’a jamais rien connu d’autre que cet ordre et cette dichotomie qui mène la danse. L’échiquier cruel sur lequel ils évoluent tant bien que mal. D’Ushaia à Arkham, il n’a jamais connu que cette curieuse famille aux bras immenses et aux pertes grandes aussi. Et quelquefois comme ce jour, l’idée d’un renouveau, d’un battement de cil qui suffirait à balayer ces troubles, le saisit. Mais il ne sait jamais tout à fait qu’en faire ; qui y a-t-il d’autre dans ce monde, pour lui, pour eux ?

Il opine doucement du menton, ravi d’entendre que Saoirse corrobore ses idées.
— Difficile pour moi aussi. C’est ce qui me plaît, après-tout.
Cette existence, sans doute, n’aurait pas été trop malheureuse. Peut-être alors aurait-il encore à ses côtés son père, et ses adelphes morts dans la bataille ou arrachés à ce monde par l’éreintement. Peut-être, peut-être, peut-être. La frustration des possibles est trop grande. Il la chasse d’un ris léger.

Il pose son attention sur les préparations, s’empare d’un petit sandwich dans lequel il plante un croc vorace. Il marque un instant de pause, avant de répondre.
— Mh. Pas depuis notre arrivée. Il secoue la tête. Encore haut comme trois pommes quand les quelques rescapés de sa famille ont fuit les terres devenues inhospitalières de l’Argentine, il en conserve un souvenir lointain, mais toujours attendri. Je me souviens de notre maison, là-bas. Les hautes montagnes, la mer. L’air était toujours doux à Ushaia. Il respirait mieux, là-bas. Rares sont devenus les moments où il évoque complètement ces souvenirs, car ils finissent tous cruellement entachés par le drame.

Glissant son attention toute entière sur Saoirse, il plante ses pupilles dans les siennes.
— Tu aimerais partir ?

Un rire.
— J’aimerais te la montrer, crois moi.
Il aimerait la montrer à tous ses proches – les emmener avec lui voir ce morceau de paradis. Il lui a été arraché, et de la terre de feu ne restent à présent que des souvenirs sépias à l’ombre de sa mémoire.

Puis, il acquiesce. L’idée de retrouver une terre où le soleil s’étend longuement est plaisante. La lumière chasse les ombres, et avec elles s’éclipsent les ennuis. Naturellement, Saoirse a raison – c’est une déformation professionnelle qui les saisit.
— Mh, sans doute – mais j’comprends : c’est tentant, l’idée du jour permanent, il la rejoint dans un haussement d’épaules. Plus de problèmes à l’horizon ! Et il balance sa tête en arrière, laisse son regard se balader sur bleu du ciel.

Leurs responsabilités leur collent à la peau. Même dans l’insouciance d’un moment comme celui-ci, leur sévère réalité se rappelle à eux. Elle s’accroche furieusement à chaque souvenir et épouse chaque souhait à peine formulé du bout des lèvres. Et quand se soulève la question de la famille – cette réalité est encore là.

Leon ne quitte pas le ciel du regard – comme s’il allait lui échapper – mais se targue d’un large sourire.
— Ça me plaît, ouais. Je crois que c’est l’un des meilleurs trucs qui me soient arrivés, récemment. Malgré tout. Il se tourne de nouveau vers Saoirse, prends un temps pour rassembler ses pensées. J’comprends, ceci dit. C’est vertigineux, au départ. Enfin, pas qu’au départ. Lui aussi, s’est posé nombre de questions – mais aucune parcelle de lui ne regrette. Et – oui. Forcément, je me pose des questions sur l’avenir ; le mien, celui d’Anahi. Pli du cœur. La confession est douce-amère. Mais elle est là, moi aussi. J’ai été heureux dans ma famille – malgré tout. Je veux qu’elle le soit avec moi. Tout de suite, c’est tout ce qui compte vraiment, je crois.

Il penche la tête de côté, pensif un instant avant de poursuivre.
— C’est normal d’avoir des inquiétudes. Lui-même en eu avant, et persiste à en avoir. Leur monde est parfois sordide, pourquoi y mêler des enfants ? Leon a suivi ce que ses parents ont fait avant lui. L’évidence lui est venue, non sans son lot d’interrogations. Mais toi – au-delà de tout ça, au-delà des doutes et des ombres qui tapissent les murs de notre réalité, toi, est-ce que t'aimerais avoir des enfants, un jour ?

Le soleil est chaud, les rires tendres – dans les ombres, s’immisce une douce amertume. Oh, rien qui ne saurait chasser tout à fait le sourire flottant aux lippes de Leon. Il rit, il aime, il croit : pour lui, mais surtout pour les autres. Pour leur ôter le poids d’avoir à le faire. Au creux de ses paumes, il recueille la lumière des jours pour en faire des puits d’espoir.

Il rit, il aime, il croit : pour lui.
Car sans cela, cette existence lui serait trop pénible. Les réalités énoncées par Saoirse sont sensées, et viennent doucement pincer son myocarde. Il opine. Usé par les nuits courtes et le sérieux de son métier, d’ordinaire, il balaye négligemment ces constats. Les confidences de Saoirse à ce sujet se dressent comme un étrange miroir face à sa propre pensée.

— Seule ? il relève avec simplicité. Hm, je vois. Tu sais – je comprends. Je crois que… ce sont des questions que je me suis posées, moi aussi. Parfois. La responsabilité d’un parent lui est encore, quelquefois, vertigineuse. Et l’allusion au temps qu’il lui reste fait chavirer son cœur. Mais il n’y pas de bonne réponse, j’imagine. On tâtonne. On fait de son mieux. On évolue dans l’obscurité, au jour le jour, jusqu’à ce que les lendemains s’éclairent. On espère, on prie, on chante des berceuses avant que ne s’éteigne le jour pour chasser les monstres tapis sous son lit. Les ombres aux dents longues, qui sévissent dans la nuit. Tu es peut-être la plus raisonnable d’entre nous. Un rire. Bancal.

Les yeux rivés sur Saoirse, même quand son regard se soustrait au sien, il marque une pause – une seconde de flottement.
— Sûrement, il répète. Dans une autre vie. Les mots se répandent en longs échos dans sa tête.

Deux doigts glissent vers une mèche de cheveux de Saoirse : d’un pincement, il en retire un brin de pollen qu’une brise aura porté jusqu’à elle.
— Mais dans une autre vie, on aurait peut-être pas partagé ce repas, il rétorque – la voix se fait plus légère. Ses yeux roulent avec exagération. Et ça, vois-tu, ç’aurait été inacceptable. Mutin pour mieux chasser la pesanteur de leurs observations, il se laisse choir de nouveau sur le dos, sa tignasse blonde mêlée à quelques brins d’herbe. Ses yeux clos profitent de la caresse du soleil qui perce ça et là entre le feuillage.

— Vivre sans regret – ou le moins possible. C’est tout ce qui compte, je crois.

Quelques mots, et elle l’attendrit. Peut-être est-ce le fait de ce moment particulier, loin des tracas usuels, sous la caresse d’un soleil encore chaud. Il en cueille les rayons, qui percent ça et là par le feuillage, et laisse rouler leur tiédeur sur sa figure. Pendant ce temps, il l’écoute.

Ses paupières se rouvrent, il penchent légèrement la tête pour la retrouver dans son champ de vision.
— C’est certain – c’est une course qui s’arrête jamais tout à fait, je crois. Il rit, doucement. Son quotidien s’articule désormais autour d’Anahi ; il vogue d’une responsabilité à une autre, navigue entre les urgences, s’efforce au mieux d’endosser son rôle. Par bonheur, les éclats de joies de sa fille suffisent à dissiper, temporairement, tous les tracas du monde. Mais ce sont les derniers mots de Saoirse qui viennent gratter quelque chose en lui qu’il enterre consciencieusement, d’ordinaire. Mais – je comprends. Tu sais, c’était mon cas. Anahi, je l’ai eue en sortant de mes études. J’avais l’impression que… c’était maintenant où jamais. L’aveu est soufflé, il hausse des épaules. Je suis pas certain que c’était vrai. Qu’il y a une date limite. Et puis qu’importe : je saurai jamais.

Il se redresse sur ses coudes, la mine sereine, malgré les interrogations qui flottent en son esprit. A la mention d’Anat, il opine.
— Je sais. Elle est solide. Son myocarde est gonflé par toute la fierté et l’affection qu’il porte à sa sœur. Il n’a guère plus qu’elle de leur fratrie, et chaque fragment de ce qu’elle est et de ses enfants est un vent de félicité. Et, heureusement, elle est bien entourée. Ce sourire, il l’offre à Saoirse, bercé de sincérité. Il sait l’importance de la jeune femme pour sa sœur, leur complicité et leur tendresse mutuelle.

Ses doigts viennent picorer quelque assortiment de fruits coupés ; leur fraîcheur est bienvenue.
— Tu sais, si tu as besoin de décompresser au travail parfois – ma porte est ouverte.