Quoi de mieux pour parler de Lazare que d’utiliser ce qu’il aime le plus en comparaison ? Nous espérons que l’estimé lecteur à la main verte et n’est pas allergique au pollen.

En effet, chaque trait de caractère de Lazare se retrouve dans la nature, il n’est pas aussi original que ce qu’il aime croire.
Sans trop de surprise, c’est le chrysanthème qui ne vient en premier à l'esprit. Il sait s'adapter et résister à tout. Certes, sa condition de Vesperis l’aide beaucoup en ce domaine, mais il est surtout résilient, intelligent et prudent. Il sait voir et éviter les pièges, préférant se tenir à l’écart quitte à disparaître des années pour soudainement revenir comme si de rien n’était.

Si vous souhaitez le faire sortir de sa cachette cependant, il suffira de l’appâter avec n’importe quelle information croustillante, n’importe quelle découverte ou nouveauté. Il a une curiosité que sa grand-mère trouvait débordante, son père, envahissante et sa créatrice, passionnante. Le terme qu’ils cherchaient tous était “morbide”. Petit, il s'intéressait déjà de voir un rat se tordre de douleur après avoir avalé du laurier et des baies de sureau cachés dans un fromage. Plus tard, il se faufile sur les champs de bataille pour voir ce qu’il se passe à l’intérieur de ces ventres rose. Au fur et à mesure des années qui passent et qu’il s’éloigne de l’humanité en général, il voit de moins en moins le problème de mettre sa main en entier dans un estomac, sans broncher, pour en sortir un parasite ou bien de faire ingurgiter simples, épices ou piments à des patients plus ou moins conscients ou consentants.
Pour cela, il est comme un plan de lierre qui pousse et explore tous les recoins, toutes les failles, jusqu’à briser les murs de la maison qui le supportait.

Afin d’étancher sa soif de connaissance, il a toujours été un véritable opportuniste. Comme un tournesol qui se tourne d’instinct vers le soleil, il choisira toujours le chemin qui l'amènera à son but. Il ne perd pas souvent le nord (ou l’est, dans notre cas).

Dans une roseraie, il y a toujours une fleur plus colorée, plus odorante, plus délicate que les autres. Elle est souvent tout en haut, se sait supérieure et vous lancera un regard narquois et arrogant (ne serait-ce que parce qu’elle peut vous regarder sans yeux, ce qui est, il est vrai, assez impressionnant). Lazare a également cette attitude. Il a beaucoup travaillé, il s’est beaucoup éduqué, a voyagé pour tenter de comprendre tous les mystères de la Terre. Est-ce qu’au long de sa longue existence il a eu droit à des cours d’humilité ? Bien entendu. Il y a des Vesperis plus forts que lui, des humains pour éveillés, des êtres plus nobles et il le sait. Ce constat le plonge régulièrement dans de longues phases méditatives. Est-ce que ça l’empêche de vous regarder comme si vous étiez du chiendent au pied de son rosier ? Pas le moins du monde. (Oui, même l’estimé lecteur. Si une rose peut vous juger, il voit mal pourquoi un écran l'empêcherait d’en faire autant).

Dans la même lignée, son grand âge et une certaine lassitude l'ont rendu goguenard, moqueur et cynique. Cela nous fait donc penser à une œnanthe safranée; une petite plante blanche qui a la capacité surprenante de faire mourir les gens de rire, dans un dernier sourire crispé. Nous conseillons à l'estimé lecteur de ne pas lancer Lazare dans cette discussion. Il vous racontera comment les Sardes utilisaient cette plante pour mettre fin à la vie de leurs vieillards. Ce qui explique à la fois l’expression “avoir un rire sardonique” et celui que Lazare portera tout le long de cette conversation.

Malgré son air de diablotin, amusé de connaître quelque chose qui vous dépasse, il peut aussi se montrer colérique et têtu. Tel une orchidée capricieuse, difficile à entretenir, qui sera splendide une année, puis sèche et morte celle qui suit sans qu’on sache vraiment pourquoi, il sera le parfait gentleman une nuit mais si vous avez le malheur de l’arroser dans le mauvais sens… Il se mettra dans une colère noire et vous rayera de sa liste de gens intéressants. Il attribue très souvent ces accès de rage à la Bête qui se rapproche de la surface. Par soucis d’honnêteté, nous devons informer l’estimé lecteur qu’il n’en ai rien.

Pour finir, bien que Lazare soit un soignant, un médecin ayant traversé des continents et des générations, c’est bien moins altruiste que ce qu’on pourrait penser. Après tout, un berger veillera à ce que ses moutons soient en bonne santé.On peut donc oublier l’empathie naturelle qui vient normalement avec le mot “soignant”. Cependant, à l’image d’un cactus cachant l’eau si vitale derrière une barrière d’épine, Lazare sera très protecteur avec tout ce qui lui est cher. Ses carnets, son jardin, sa tranquillité en général et surtout les siens. Les vespiris qu’il aime, certains humains qu’il trouve plus malin que les autres ; les quelques amis qui lui sont précieux et pour qui il pourrait sortir de sa bulle de verdure pour les protéger à tout prix.