interlude

whilst the beast is asleep

Darcy tire ses lippes en un sourire courtois. Les visites de Belial ne l’inquiètent pas, et sa compagnie ne lui est pas désagréable, malgré la curieuse tension qui suppure sans éclat entre eux. Le flegme et l’absence de souci dont il se pare est un rafraîchissement dans son entourage. Il ne plie pas, ne s’excuse pas, ni ne cherche une reconnaissance dantesque – et quand bien même leurs ambitions diffèrent, son naturel est tel qu’elle ne se résout à autre chose qu’à en apprécier la simplissime accointance. Un ami.

— Entre, je t’en prie.
Elle s’éclipse du battant pour le laisser passer. La Bergerie l’accueille avec sa placide sérénité : elle enveloppe quiconque en franchit le pas de ce mysticisme qui n’appartient qu’à eux. Rien ne saurait déranger l’existence du berger entre ces murs, cette demeure comme l’extension de leur propre existence. Elle acquiesce.

— Oui, elle balaye l’espace d’un papillonnement du regard. Je suis ravie de te l’entendre dire. Son pas la guide jusqu’aux assises qui trônent au cœur de la pièce à vivre, ses doigts courent contre le dossier d’un fauteuil. C’est le cœur de nos préoccupations, après tout. Offrir le calme, à quiconque le cherche. Les troubles se défont au seuil de la porte, pour ne laisser suinter au sein de la Bergerie que l’amour d’une déité et l’adoration de ses enfants qui viennent en chercher la sainte consolation.

— Installe-toi, fait-elle en désignant l’assise où couraient ses doigts un instant plus tôt. Désires-tu boire quelque chose ? Ses orbites noires plantées dans celles de Belial, elle conserve à sa figure une mine sereine, quand bien même à ses lèvres pende encore une étonnante interrogation. Rares sont ceux qui font le chemin jusqu’à eux pour une simple visite de courtoisie – mais peu lui importe. Pour l’heure, elle se fond avec délice dans le décor de son propre royaume.